Je devais me rendre cette année au Salon du Livre parisien, pour raisons tristement professionnelles et non par plaisir, et surtout pas pour draguer les printanières hôtesses d'accueil, et plus si disponibilité, en me faisant passer pour monsieur Pierre A., LE blogueur littéraire, auquel je ressemble comme deux gouttes de café du Chiapas.
Aussi me suis-je un peu renseigné pour savoir dans quoi j'allais mettre les pieds: au Salon de l'Agriculture, on s'en doute, mais on sait aussi qu'il n'y a aucun risque, c'est tout de suite balayé et nettoyé, mais au Salon du Livre, j'avais des craintes.
C'est ainsi que j'ai su que madame Albanel n'avait pas fait l'inauguration. Mon journal m'a appris qu'elle était retenue à l'assemblée Nationale. J'ai tout de suite admis qu'elle ne pouvait être présente partout: quand elle est quelque part son insignifiance naturelle la rend déjà semi tanslucide, alors en deux lieux, j'imagine qu'elle dépasserait le seuil de l'invisibilité.
On a donc dépêché sur place madame Kosciusko-Morizet, secrétaire d'Etat à l'économie numérique. Je me suis laissé dire que le choix du secrétaire d'Etat qui prendrait ce djobe d'inauguration a été délicat: on a failli voir le secrétaire d'Etat aux anciens combattants, qui a de plus en plus de temps libre depuis la mort du dernier poilu.
Je me suis aussi inquiété de savoir si je risquais de voir ma visite au salon perturbée par celle, plus gourmande d'espace, du Président de la République. On m'a rassuré: le président n'envisage pas d'aller à la rencontre de ce secteur d'activité avant d'avoir terminé la lecture de la Princesse de Clèves que lui fait Carla quand ils ont le temps.
Je savais bien que monsieur Sarkozy n'avait pas le même goût pour la littérature que certains de ses prédécesseurs dans la fonction. Le plus excessif d'entre eux, François Mitterrand, avait été jusqu'à aller enquiquiner quelques uns de nos grands monstres sacrés chez eux – c'est ainsi qu'il avait, dit-on, demandé à René Char de pouvoir s'asseoir à son bureau !
Mais j'avais redouté que, le Mexique étant le pays mis à l'honneur de ce Salon, le président, de retour d'un séjour de rêve, aurait un petit accès de « revenez-y » et le désir de découvrir ce territoire littéraire d'une grande richesse, qui a inspiré des auteurs aussi divers que D. H. Lawrence, B. Traven, A. Artaud, M. Lowry, J. M. G. Le Clézio, R. Bolaño, R. Fresán... et tant d'autres, et tant d'autres...
Il semble que non. Avec le Mexique, la page est tournée: Frédéric Lefebvre attaque.
Notre présidentiel frimeur ne nous dira probablement jamais dans quel roman mexicain compliqué il s'est embarqué en se faisant inviter dans ce palace pour milliardaires. Peut-être n'en sait-il rien lui-même: une invitation de plus ou de moins, obtenue à coup de tapes sur l'épaule et de sourires forcés...
3 commentaires:
Moi, je suis d'accord avec Lefebvre : "Salir un homme tel que Nicolas Sarkozy avec des procès de ce type, c'est scandaleux !"
C'est vrai, ça : on commence par manquer de respect à Nico, on continue en moquant les pauvres capacités intellectuelles de Lefebvre, et on finit en feuilletant La Princesse de clèves chez le coiffeur… Ça craint.
(Point très anecdotique, je crois que tu as oublié un mot dans : "…si je risquais de voir ma visite au salon par celle…" Ça serait pas "parasité" ?)
Il a raison Lefebvre un séjour payé par un narco trafiquant enfin peut être , c'est moins scandaleux que de dire que la délation est un devoir républicain !
@ JBB,
C'est vrai, je crois que je suis sur une mauvaise pente...
(Je vais mettre "perturbée"...)
@ Marianne,
C'est vrai itou, il faut raison garder.
@ tous deux,
Il y a des jours où je suis (presque) consensuel...
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