jeudi 27 mars 2008

Juste une image

C'est juste une image qui traîne sur mon disque dur où je l'ai enregistrée le 20 mars à 17h 34.



C'est aussi une image qui se veut une "image juste", puisqu'elle fait partie des premières que les autorités chinoises ont laissé passer sur les émeutes du Tibet et leur répression. Il est même tout à fait possible qu'elle ne soit qu'une mise en scène (cela c'est déjà vu).

Peu importe, admettons qu'elle nous présente quelques uns des émeutiers que la police chinoise a été obligée d'arrêter dans sa mission de maintien de l'ordre… Nous les voyons se tenir debout, sans menottes, surveillés de près par des policiers dont on ne voit pas les armes; certains baissent la tête, mais aucun ne semble blessé, ni avoir été molesté. Ils portent tous un vêtement bleu sans manches passé au dessus de ce qui semble être leur propre blouson. Est-ce le signe distinctif de leur condition de prisonniers? On peut le supposer et se réjouir de la prévenance de l'Etat Chinois: il ne doit pas faire bien chaud, en ce moment, dans les prisons du Tibet, et une petite laine ne doit pas être de trop.

Et devant cette "image juste", j'en arrive à me poser juste une question: Combien d'entre eux ont encore besoin de cette petite laine?

Soit, pour qu'on comprenne bien à quel point je suis naïf et sentimental: Combien encore en vie? Et dans quel état?

Sur la question dite des "Droits de l'Homme", je ne suis pas sûr d'être tout à fait au point. Il faudra peut-être qu'un jour j'arrive à expliciter cette position inconfortable qui consiste, en gros, face à une religion s'autorisant d'un absolu (l'Homme et ses Droits), à être pratiquant mais pas croyant… Alors, en l'absence d'un corps de doctrine personnel, je me mets volontiers à l'écoute des prêtres de la religion humanitaire, fussent-ils un peu défroqués.

Juste un exemple au hasard: Monsieur Bernard Kouchner qui, plus que simple prêtre, mérite tout à fait le statut de théologien, père de l'église. Laurent Joffrin, dans un de ces éditoriaux dont il a seul le secret (heureusement!) nous rappelle que "l’ex-French Doctor (…) s’est toujours distingué par son courage physique et son sens du geste symbolique en faveur des libertés dans le monde" et qu'il a su être un véritable "Robin des droits" (où va-t-il chercher tout cela, Joffrin?) en inventant le "droit d’ingérence".

J'écoute donc Monsieur Kouchner qui, lui-même, à son habitude, s'écoute parler devant deux journalistes de Libération, Thomas Hofnung et François Sergent:


«Mais les droits de l’Homme ne peuvent pas résumer une politique. Du moins quand on est responsable du ministère des Affaires étrangères. C’est une exigence, mais cela ne peut pas être la seule politique, hélas.

Mais qu’est-ce qu’on peut faire de plus sur le Tibet?

J’ai toujours dit que la politique et l’humanitaire, les droits de l’Homme étaient imbriqués, j’ai même été très critiqué pour cela. J’écoute avec beaucoup d’attention ce que disent les militants, mais un ministre des Affaires étrangères ne peut pas avoir la même liberté. Et pas seulement pour le Tibet. Sauf à démissionner le lendemain. Le jour où je trouverais cela insupportable, il faudra que je m’en aille. Je demeure un militant des droits de l’Homme.

Lors du dernier conseil des ministres, j’ai dit que les Chinois se trompaient de manière assez virulente. Nous avons eu un débat avec le Président et les ministres, ce qui n’est pas très fréquent.

Nous sommes aussi contraints de ménager un certain nombre d’intérêts économiques pour ne pas creuser le chômage: cela s’appelle gouverner


"Robin des droits" (où va-t-il chercher tout cela, Joffrin?) en est donc encore à dire qu'il démissionnera le jour où cela deviendra insupportable, à laisser entendre qu'il avale les couleuvres pour mieux manger son chapeau (de cardinal? avec les pompons?). On notera qu'il débat avec le président au conseil des ministre et qu'il sait ce qui s'appelle gouverner.

Alors, rien à dire.

J'imagine que le jour où les gouvernants chinois se seront rendus compte qu'il est trop coûteux d'aller réclamer le prix des balles aux familles des condamnés à mort exécutés, Monsieur Kouchner se félicitera des grands progrès effectués par la Chine dans le domaine des Droits de l'Homme.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Comment font-ils tous ?
Kouchner, comment fait-il ? Il me pleurait dans l'oreille (et ce n'est pas sardonique, il avait réellement la voie brisée) dans cette émission de France Culture :
http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/surpris/fiche.php?diffusion_id=59133
...à croire qu'il s'est vite remis. Bah, faut bien continuer à vivre, hein, au milieu de la variétés des massacres.
Kiki

Guy M. a dit…

Merci pour le lien, je m'en vais tenter d'écouter cela (si j'y arrive... je suis très mauvais pour le son...)

Kouchner a l'air de supporter sa tâche. Il joue les martyrs ("si on dit ce que l'on pense, on ne tient pas huit jours, mais regardez comme je suis déchiré et héroïque"...et.)

Anonyme a dit…

La question n'est-elle pas plutôt "que peut-on faire de moins pour le Tibet?"

Tout cela donne envie de s'enfuir. Loin. Au Mexique par exemple.

M.

Anonyme a dit…

Défendre les Droits de l'Homme... Ce n'est pas une mauvaise idée, mais être ministre, c'est-y pas mieux ?

Guy M. a dit…

@M.(comme matinale?),
Merci d'être venue...
Ne soyons pas trop caustique avec mr Kouchner, il doit beaucoup souffrir...(pour le Mexique, voir prochain billet).

@Françoise,
Ah oui, mais à entendre mr K., quel travail! Il est tiraillé de partout, le pauvre homme.