mardi 21 avril 2009

Taoufik sera ici chez lui

Ce jeune homme s'appelle Taoufik El Madroussi, et il va bientôt pouvoir rentrer chez lui.

Taoufik à Oujda (Maroc) en octobre 2008.

Chez lui, c'est ici.

Arrivé en France en 2002, Taoufik était en terminale au lycée Louis-Girard à Malakoff, où il préparait un bac professionnel de mécanique-carrosserie, quand il s'est fait arrêter par la BAC, le 6 mai 2008.

La suite est racontée ici.

Malgré une forte mobilisation en sa faveur, il a été expulsé du territoire français le 28 août 2008.

On peut relire les mots amers écrits le jour même par Richard Moyon, du RESF, sur le blogue A l'école des sans-papiers:

26 août 11h45 : il est extrait de force de la prison administrative de Palaiseau et conduit en voiture au Bourget. Il est monté dans l’avion-prison particulier du ministère de la honte : pilote policier, équipage policier, escorte policière. Direction Montpellier. Il est placé dans une voiture, conducteur policier, escorte policière qui l’emmène à Sète où il est embarqué sur un bateau toujours avec une escorte policière. 40 heures de navigation, arrivée à Tanger le 28 août à 13h d’où il vient d’appeler. Il ne lui reste plus que 10 heures d’autocar pour se rendre, là où il ne voulait pas aller, chez un oncle qu’il aime bien, on le suppose, mais chez qui il n’avait en aucune façon le désir de s’incruster.

Il faut adresser de chaleureux compliments à toute la chaîne de commandement et d’exécution dont la compétence et la servilité ont permis un exploit qui fait honneur à ce pays, à sa police, à son gouvernement et à son président. Marseillaise, s’il vous plait !


Les petites mains asservies avaient bien fait tourner la machine à expulser...

Cette machine était assez bien huilée pour que monsieur Hortefeux, alors ministre de cette honte, ne donne aucun signe de connaissance du dossier lorsqu'il sera interrogé pendant la séquence de questions des auditeurs du 7/10 de France Inter du 8 septembre 2008.

Rassemblement du 1er octobre 2008.

Le contact s'est maintenu entre Taoufik et ses soutiens. L'ensemble du lycée Louis-Girard, élèves, professeurs, direction, s'est placé derrière lui. Un comité de soutien s'est constitué, une pétition a été lancée, un site ouaibe ouvert, des rassemblements organisés...

Il a fallu beaucoup de patience, beaucoup de détermination, beaucoup d'espoirs et de découragements aussi, sans doute... Il a fallu poser le principe d'une grève générale du lycée prévue le 31 mars, mais qui n'a pas eu lieu:

Devant le lycée Louis-Girard à Malakoff (Hauts-de-Seine), la banderole « Taoufik doit revenir » a été barrée d’un «va» victorieux. La grève générale prévue hier pour exiger le retour de ce lycéen sans-papiers de vingt et un ans, expulsé en août 2008, s’est donc transformée en assemblée joyeuse devant le lycée.

Le retour de Taoufik était enfin devenu possible.

Et la joie de tous ses amis.

Même s'il faut rester conscient des limites de cette victoire, comme le rappelle l'article de l'Humanité déjà cité:

Symbole de la double peine, Taoufik est aussi l’exemple de ces jeunes devenus sans-papiers le jour de leurs dix-huit ans. Richard Moyon, du Réseau éducation sans frontières (RESF), revient de Lyon où se tenait ce week-end une assemblée générale de ces jeunes majeurs. « La victoire pour Taoufik est énorme, mais c’est le fait du prince, dit-il. Quand la pression est trop forte, le ministre recule. C’est complètement arbitraire, il faut que la loi change. »

Ce soir, à 21 h 30, Taoufik sera accueilli dans un salon d'honneur de l'aérogare d'Orly-Sud. On peut lire une certaine jubilation dans l'annonce qui en est faite:

Pour la deuxième fois dans l'Histoire de France (ben oui, inutile de la jouer petit bras), un jeune expulsé parce que sans papiers sera reçu avec les honneurs habituellement réservés aux chefs d'État et aux ministres : voiture officielle au bas de la passerelle de l'avion, discours… La première fois avait été Suzilène, lycéenne de Colombes, revenue en février 2007 ; Taoufik est le deuxième... Ensuite, à qui le tour ?

Rendez-vous à 21H15 au pied de la rampe d'accès aux salons d'honneur. Quand on est face au bâtiment d'Orly-sud, la rampe d'accès est complètement à droite du bâtiment.
Seule une délégation d'une quinzaine de personnes aura accès au salon (il faut déposer les identités en avance). Taoufik et Elise y seront accueillis rapidement (l'essentiel est le symbole) puis on sort rejoindre tous ceux, nombreux ! qui l'attendront.

Les otages libérés ont aussi droit à un accueil dans les salons d'honneur des aérogares...

Et en réalité, pendant près de huit mois, Taoufik a bien été l'otage d'une politique inepte et inique.

Monsieur Besson, qui est plus à cheval sur le vocabulaire que sur les principes des droits humains, récuserait probablement ce mot.

Qu'importe, il ne sera pas là, ce soir.

Il prépare son déplacement à Calais.

4 commentaires:

JBB a dit…

On n'est tellement plus habitué aux bonnes nouvelles que ça en paraît incroyable. En tout cas, bravo à ceux qui se sont bougés les fesses : ça paye, des fois.

Guy M. a dit…

Oui, ça réconforte, et je serais bien allé à Orly, pour le symbole.

A part ça, la machine continue, en roue libre.

JBB a dit…

Clair. Il suffit de voir tes billets suivants pour comprendre que l'accalmie était bien de (très) courte durée.

(D'ailleurs : mazette, quelle productivité ! T'as bouffé du lion ?)

Guy M. a dit…

C'est un hyperactif, notre monsieur Besson!

(J'ai pas mal relayé, faut dire...)