lundi 20 avril 2009

L'intelligence des élus

La chose fait grand bruit, et inquiète fort les habitants de la région Poitou-Charentes ou Charentes-Poitou. On peut les comprendre: et si, non contente de présenter des excuses pour quelques bourdes de monsieur Nicolas Sarkozy, madame Ségolène Royal se mettait en tête d'être exhaustive et d'étendre son action à toutes les indignités proférées par les membres du parti qui nous gouverne ? On voit bien qu'il y a là de quoi faire un plein temps.

Sa première initiative retentissante, à Dakar, le 6 avril, fut de dire, en revenant sur le fameux discours prononcé au même endroit par monsieur Sarkozy, le 27 juillet 2007:

Quelqu'un est venu ici vous dire que "l'homme africain n'est pas entré dans l'Histoire". Pardon pour ces paroles humiliantes et qui n'auraient jamais dû être prononcées et qui n'engagent pas la France. Car vous aussi, vous avez fait l'histoire, vous l'avez faite bien avant la colonisation, vous l'avez faite pendant, et vous la faites depuis.

Je trouve qu'il y a dans ces paroles, que d'autres ont analysées avec d'autres lunettes, beaucoup de panache et de justesse.

Et il me semble qu'il n'est pas mauvais de rappeler de temps en temps que monsieur Sarkozy, tout élu qu'il soit au suffrage dit universel, n'a ni la carrure, ni la culture, pour représenter la France, et parler au nom de tous les français.

Ségolène Royal en visite à Thiaroye
dans un collectif de femmes luttant contre l'émigration clandestine.


Le 5 avril, madame Ségolène Royal s'était rendue à une dizaine de kilomètres de Dakar, à Thiaroye. Elle y a été accueillie par une cinquantaine de femmes vêtues de boubous bleus. Ces femmes ont, pour la plupart d'entre elles, perdu un fils cherchant à quitter le Sénégal en pirogue. Elles s'organisent pour lutter conte l'émigration, et la venue madame Royal accompagne la livraison d'un camion frigorifique.

A son arrivée, on lui a offert un boubou traditionnel, qu'elle a immédiatement revêtu, pour la plus grande joie de ses hôtes. Des photos ont été prises qui montrent la joie de ce groupe de femmes, et il semble bien que madame Royal se laisse aller à cette joie sans arrière pensées.

Ces images ont beaucoup fait ricaner dans nos contrées et avant que monsieur Patrick Sébastien, intellectuel contemporain, ne s'en empare ("Royal et son boubou ? Putain, c'est ridicule !"), un certain monsieur Alain Destrem, élu UMP du quinzième arrondissement au conseil de Paris, avait déclaré, avec beaucoup de finesse, que la photographie ci-dessus lui faisait penser à sa femme de ménage.

Incontestablement, pour ce monsieur, il faut tartiner la finesse en couches assez épaisses pour qu'il puisse en sentir le goût...

Malgré le mea culpa publié par ce digne chef d'entreprise qui doit gérer l'intelligence en flux tendu (pas de stock), ces mots resteront, car ils laissent entendre tellement plus qu'ils ne disent. Je souhaite que les femmes de ménage du XVième sauront l'accueillir selon le rang qu'il a voulu prendre, la prochaine fois qu'il voudra parader sur un marché.

Pour juger du style élevé de cet humoriste, voici la fin de son communiqué:

Tout ceci m'est apparu bien éloigné de l'image que l'on peut avoir d'une femme politique d'envergure, au demeurant ancienne candidate à la Présidence de la République. Face à une polémique qui semble naître, je retire mes propos.

Certains ont demandé à monsieur Destrem à quoi pouvait bien lui faire penser cette autre photographie:

... probablement à un homme politique d'envergure, et très à l'aise, on dirait.

Les propos de table de monsieur Nicolas Sarkozy, qui pourtant ne boit que de l'eau, ont déclenché une seconde rafale d'excuses de la part de madame Royal.

Il est vrai que ces considérations, qui portent sur un sujet sensible pour le président, celui de l'intelligence, mettait curieusement en cause, au cours d'un échange avec monsieur Emmanuelli, monsieur Zapatero:

En guise de douceur (nous sommes au dessert), le président de la République ne résiste pas à informer ses convives que «le gouvernement espagnol vient d’annoncer la suppression de la publicité sur les chaînes publiques. Et vous savez qui ils ont cité en exemple ?» «On peut dire beaucoup de choses sur Zapatero», remarque Emmanuelli. «Il n’est peut-être pas très intelligent. Moi j’en connais qui étaient très intelligents et qui n’ont pas été au second tour de la présidentielle», s’amuse Sarkozy en allusion à Lionel Jospin. Avant de revenir à son sujet de prédilection : «D’ailleurs, dans ma carrière politique, j’ai souvent battu des gens dont on disait qu’ils étaient plus intelligents et avaient fait plus d’études que moi.»«On a pensé à Villepin», lâche un convive. Conclusion du Président : «L’important dans la démocratie, c’est d’être réélu. Regardez Berlusconi, il a été réélu trois fois.»

Là-dessus, monsieur Bernard Kouchner s'est livré à un désopilant commentaire linéaire, en endossant le rôle du vieux croûton:

Explication de texte par l'ancien socialiste: «Oui, c'est comme ça qu'il parle, en effet. Il est vivant, il est jeune et vivant, ça fait une différence.»

D'autres propos, d'un goût aussi douteux ou d'une prétention considérable, auraient été tenus avant la compote de pomme (ce fut le dessert présidentiel). Ils ont suscité maints commentaires dans la presse internationale.

Le plus simple était de démentir et d'accuser le quotidien Libération de manipulation... Ce qui fut fait.

Libération persiste et signe, et monsieur Laurent Joffrin en arrive à exiger des excuses !

On patauge dans les excuses de tous côtés...

Ça en devient gluant, je trouve.

D'autant plus que monsieur Jack "je vote pour" Lang se joint à cette amusante polémique, à sa manière décalée et si intelligente:

«J’ai envie de dire à nos amis espagnols: excusez-la, pardonnez-lui!», a déclaré l'ancien ministre socialiste sur Europe 1. Tour d'horizon des réactions politiques après les excuses de Ségolène Royal à Jose Luis Zapatero.

Cette initiative, après l'annonce de sa décision de voter la loi Hadopi, attire l'attention sur la très grande intelligence inemployée de monsieur Jack Lang. On sait bien qu'il est profondément affligé de se sentir inutile à la grandeur de la France, et probablement prêt à tout pour servir son pays.

Si c'est une offre de services, elle risque d'être un peu trop subtile...

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