mercredi 24 décembre 2008

Tradition de Noël



On sait bien qu'il y a des traditions des pays chrétiens qui n'ont rien à voir avec le christianisme institutionnel.

C'est avec une belle intention que l'on met à la table du repas de Noël un couvert supplémentaire, appelé couramment "l'assiette du pauvre", pour y placer le voyageur égaré qui viendrait frapper à la porte, afin qu'en cette nuit personne ne se trouve isolé... Ce n'est qu'une bien belle image, car on sait bien que les sans-domiciles, les sans-papiers, les sans-existences n'ont pas le code de l'entrée. Alors, on ne risque rien à prendre la pose avec ses honorables traditions familiales en sautoir.

Autrement efficace est la tradition, initialement bien chrétienne, de l'accueil qui anime la Cimade (Comité intermouvements auprès des évacués) depuis sa fondation, en 1939, sous l'impulsion d'une théologienne protestante d'origine alsacienne, Suzanne de Dietrich.

La mission de la Cimade, qui était d'apporter une aide spirituelle aux protestants lorrains et alsaciens, déplacés dans le Sud-Ouest, n'a plus eu lieu d'être lorsque l'armistice signé par le maréchal Pétain permit aux alsaciens et lorrains de rentrer chez eux.

La Cimade décida alors de venir en aide aux internés des camps de Vichy, et s'opposa à la politique antisémite du gouvernement d'alors. Dès le début des déportations vers les camps allemands, le mot d'ordre de la Cimade a été de "sauver par tous les moyens".

Bien sûr, pour certains, il est devenu fatiguant de parler de toutes ces vieilles histoires...


La Cimade a suivi son chemin depuis près de 70 ans, avec une rigueur et une cohérence exemplaires. Son rôle actuel auprès des migrants enfermés en centres de rétention administrative est suffisamment connu.

Sans vouloir faire de mauvais esprit, on peut penser que certains de nos compatriotes peuvent être embarrassés par cette action sans concessions.

Bon chrétien en train de dire le benedicite avant le réveillon.

Monsieur Hortefeux avait envisagé de "soulager" la Cimade de tout ou partie de son travail dans les centres de rétention en ouvrant le "marché" à la concurrence. Cet appel d'offres a été annulé par le tribunal administratif de Paris le 30 octobre 2008.

Le 19 décembre 2008, on apprenait qu'un nouvel appel d'offres allait être publié "dans une version remaniée, au Journal officiel de l'Union européenne et au Bulletin officiel des marchés publics".

On savait que monsieur Hortefeux ne manquait pas d'un certain humour, nous sommes ravis d'apprendre qu'il peut aussi être un obstiné taquin...

La Cimade a réagit par un communiqué de presse, que je reproduis. C'est un peu sérieux pour un soir de réveillon, mais vous verrez, c'est bien écrit, et ce n'est pas grossier.

Nouvel appel d’offres sur les centres de rétention : le simulacre continue

Dès l’annulation du précédent appel d’offres, la Cimade a proposé au ministère de l’Immigration la mise en œuvre d’une action conjointe de plusieurs associations et organisations syndicales pour rendre effectif l’exercice des droits des étrangers en rétention. Cette proposition n’a reçu, des pouvoirs publics, ni réponse, ni début de dialogue, ni même accusé de réception.

En refusant toute concertation, en maniant habilement sa communication à l’égard des non-spécialistes, le ministère de l’Immigration a diffusé vendredi 19 décembre un nouvel appel d’offres sans qu’aucune modification sérieuse ne soit apportée à la version précédente, annulée le 30 octobre par le tribunal administratif de Paris.


Les corrections ajoutées au texte sont celles que le ministre avait déjà apportées en septembre dernier, fausses concessions puisqu’il s’agit en réalité de simples rappels de ce que la loi ne lui permet pas d’interdire.


Cet appel d’offres confirme le choix d’un marché et d’une logique libérale déplacés en matière de défense des droits de l’Homme, obligeant les associations à se poser en concurrentes. Il maintient l’éclatement en huit lots indépendants de la mission d’aide aux étrangers, interdisant de fait toute possibilité de défense efficace et globale des personnes concernées. Par cette désintégration, il annihile toute action nationale cohérente des organisations non gouvernementales. En outre, au lendemain de la révélation du scandale de Mayotte, l’appel d’offres « oublie » ce centre de rétention d'outre-mer.


Les ONG veulent le pluralisme et la complémentarité : le ministre oppose le morcellement et l’affaiblissement.

Les ONG revendiquent une vision d’ensemble : le ministre leur concède le droit de s’exprimer localement.

La « transparence » affichée par le ministère de l’Immigration n’est qu’un simulacre : cette réforme vise à fragiliser l’exercice effectif des droits des étrangers et à gêner la société civile dans sa capacité de témoignage.

Soucieuse de maintenir son aide aux étrangers en rétention, la Cimade a accepté de prolonger sa mission jusqu’au 31 mai 2009. Mais après avoir déposé avec 10 organisations un recours contre le décret du 22 août 2008 devant le conseil d’Etat, elle étudie avec ses partenaires les moyens de contester ce nouvel appel d’offres. La Cimade rejette un processus qui ne peut que conduire à la disparition de l’aide apportée aux étrangers en rétention.


Elle est très mignonne, cette petite fille,
mais elle n'a pas son assiette à la table de monsieur Hortefeux.

2 commentaires:

Marianne a dit…

Espérons que la Cimade saura raison gardée en maintenant sa présence dans les centres .Il est interdit de mordre la main qui vous nourrit en l'occurrence qui vous paye . Ce qui est le plus choquant c'est la demande de confidentialité des associations œuvrant dans les centres de rétention . Expulsions arbitraires , paranoïa terroriste , il y avait meilleure façon de fêter les 60 ans de la déclaration des droits de l'homme .

Guy M. a dit…

Je pense que la Cimade ne peut accepter un pis-aller qui la mettrait en porte à faux. Si monsieur Hortefeux a une haute idée de sa prétendue "mission", la Cimade en a également une de la sienne...