samedi 20 décembre 2008
Les prêles de l'entre-rail
Pour ses lecteurs pressés d'avoir des nouvelles du CAC40, LeFigaro.fr se permet parfois de sombrer dans la familiarité elliptique. Ainsi dans ce titre de la rubrique "Flash Actu":
Coupat : remise en liberté ?
On apprend dans cette brève, qui ne fait que reproduire une dépêche de l'AFP, que Julien Coupat est toujours en prison, bien que le juge des libertés et de la détention, qui est le juge compétent en cette matière, ait signé une ordonnance de remise en liberté.
Devinez quoi...
Le parquet a fait appel. Et l'appel sera jugé mardi prochain.
(On apprend par ailleurs que la demande de remise en liberté d'Yldune Lévy, également incarcérée, sera examinée plus tard.)
Flo Py a reproduit dans son billet fort matinal le "c'est lamentable !" de Maître Irène Terrel, avocate de Julien Coupat.
Et conclut en posant cette question:
Dites, z'auriez pas une idée pour obliger gentiment les autruches à sortir enfin la tête du sable ?...
Flo Py profite du fait que le délit d'outrage à autruche n'a pas encore été créé.
Il m'arrive, lorsque ma propension à l'asthénie dépressive est réduite par les premiers effets de ma piqûre quotidienne, de m'aventurer à lire les commentaires que les autruches déposent au bas des articles des journaux en ligne.
Ensuite, je reprends souvent une autre piqûre, par gourmandise...
Parfois je repère un mot, une phrase, une pensée... qui me font rêver.
Par exemple:
Que faisaient Coupat et autres auprès des lignes de SNCF, à cent lieues de leur domicile, en pleine nuit, le soir même où les lignes des TGV ont été sabotés ????
On voit par là que toutes les autruchons n'ont pas la tête dans le sable.
Il m'est arrivé de me voir suspecté de mauvaises intentions en me promenant innocemment dans des lieux peu propices à la promenade des autruches.
Une fois, dans un pays africain alors gouverné par un dictateur à la toque de léopard, les soupçons ont été le fait de forces du maintien de l'ordre (ou du désordre).
Nous étions allés bien au delà de l'aéroport de N'Djili, pour marcher un peu le long du fleuve Congo (alors appelé Zaïre) qui sort à cet endroit du Stanley Pool. Nous ignorions la proximité d'un poste de garde de l'armée zaïroise.
On nous demanda avec insistance notre "ordre de mission" et la discussion sur la nature de cet "ordre de mission" se conclut par la nécessité de venir à cet endroit avec un formulaire visé par les autorités militaires et comportant le sésame: "Mission: voir le fleuve."
Un jour peut-être, dans le monde rêvé par les autruchons à qui on ne la fait pas, flânerons-nous le long des voies ferrées avec un ordre de mission nous autorisant à voir "les prêles de l'entre-rail"(*).
(*) Les prêles de l'entre-rail
Absurdes locomotives !
Locomotives !
Tirant superflu et gagne-pain
Parmi les déchirures de la nuit,
Pour des hommes absurdes,
Des hommes effrayants,
Pour des hommes pénalisés
Qui ne voient pas grandir
Les prêles de l'entre-rail,
Comme Vieira da Silva les peint.
René Char (1970) Recherche de la base et du sommet (Gallimard)
PS: La liste des comités de soutien aux inculpés du 11 novembre ne cesse de s'allonger, comme vous pourrez le voir sur le site.
Les deux premiers numéros des Echos de la Taïga, bulletin du comité de soutien aux inculpés de Tarnac, peuvent être téléchargés sur le site du Jura Libertaire.
Après téléchargement, ils peuvent être imprimés, diffusés, etc... etc...
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4 commentaires:
Belle explication de texte illustrée par Viera da Silva , peu connue hélas, superbe fondation à Lisbonne sur cette grande artiste .Pour les incarcérés de Tarnac , je trouve le déroulement de cette affaire curieuse puisque ces jeunes gens étaient sous surveillance policière depuis de nombreux mois , ils auraient pu être pris en flagrant délit ?
La demande du parquet par rapport à la décision du Juge des libertés et détention pourrait avoir été inspirée par une personne concernée ne voulant pas paraître ridicule après le gigantesque déploiement des forces de police , masquées pour 9 supposés anarchistes terroristes ce 11 novembre à Tarnac .
Je divague , la justice est libre et indépendante en France !
Je crois qu'un jour j'irai à Lisbonne... il doit y avoir des rails qui vont jusque là.
La justice, oui, est indépendante; mais son application est de plus en plus contrôlée, semble-t-il.
"Je crois qu'un jour j'irai à Lisbonne... il doit y avoir des rails qui vont jusque là."
Des rails et - de ce que j'ai vu d'une rapide visite dans cette ville géniale - suffisamment d'esprit de contestation et de rébellion pour ne pas ignorer le sort qui doit être fait aux catenaires…
Pour les commentaires sur les grands titres, c'est aussi addictif que salissant. Quand j'ai vraiment envie de faire quelque chose de dégoûtant, je vais lire ceux du Post, qui naviguent avec une constance inébranlable entre le très glauque, le débile et l'absurde. Et des fois, je prends peur à l'idée que cela puisse être l'internet de demain.
"...le très glauque, le débile et l'absurde", mais toujours les premiers! Avec, en cas d'erreur, un effet de verrouillage de l'information qui est plus insidieux que l'erreur factuelle dans la presse à l'ancienne.
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