jeudi 2 avril 2009

Questions de style sécuritaire

Parmi d'autres sans doute, la dépêche de l'agence Reuters:

Un manifestant est mort après s'être effondré au cours d'une manifestation anticapitaliste mercredi à Londres, à la veille du sommet du G20, a rapporté la police britannique.

La police a indiqué avoir découvert l'homme dans une rue du quartier financier de Londres près de la Banque d'Angleterre où il était tombé. Il a cessé de respirer vers 19h30 locales (18h30 GMT).


La cause de la mort n'a pu être déterminée dans l'immédiat.


De source policière, on indique qu'il est vraisemblable que l'homme soit mort en raison de son état médical, mais que cela ne pourra être confirmé qu'après autopsie.


Les policiers ont déplacé l'homme derrière un cordon de police et ont tenté de le ranimer avant qu'il ne soit évacué en ambulance vers un hôpital voisin où il a été déclaré mort.


Les policiers ont précisé avoir dû déplacer l'homme après que des manifestants eurent lancé des bouteilles dans leur direction.


Des photographes de Reuters ont dit avoir vu la police avec l'homme gisant au sol tandis que des manifestants passaient en courant devant eux.


(Tim Castle, version française Eric Faye et Danielle Rouquié)


On notera avec quelque ironie la belle expression "mort en raison de son état médical"...

Ce n'est qu'une question de style. Un grand maître en ce domaine parlait plutôt de "mort par manque de savoir-vivre".


Le style anti-émeute de la police britannique.
(Les lecteurs/trices en bas-âge pourront se livrer
à un profitable exercice de comparaison avec le style allemand.
)

Maurice Rajsfus, un autre grand monsieur, toujours actif, et à qui l'on peut souhaiter un savoir/vouloir vivre indéracinable, s'attache à étudier minutieusement les effets de style de notre police à nous. Il anime l'Observatoire des Libertés Publiques et publie Que fait la police ?, bulletin d'information anti-autoritaire. Le numéro 29 d'avril 2009 est en ligne, et sa lecture est indispensable.

Dans le prochain numéro figurera peut-être cette "brève", relevée sur LibéStrasbourg:

LIBERTE - Un journaliste du quotidien L'Alsace-Le Pays a porté plainte mardi 31 mars pour "entrave à la liberté d'expression et du travail" et "violences volontaires" suite à une altercation avec la police nationale la veille, sur le lieu de l'interpellation d'un homme qui conduisait une voiture volée. Il affirme qu'il a été "violemment ceinturé et pris par le cou par quatre ou cinq policiers" qui lui auraient "arraché (son) appareil photo" et l'auraient "emmené de force au commissariat de Besançon". Quatre jours d'ITT lui ont été délivrés. La police conteste les violences.

Une banderole et des photos d’Abdelhakim Ajimi*
lors d’une manifestation demandant l’ouverture d’une enquête sur sa mort.

Je crains que Maurice Rajsfus, dangereux personnage dont la fiche de police a dû être commencée sous le régime de Vichy, ne soit pas lu au ministère de l'Intérieur...

Mais on y lira peut-être le rapport qu'Amnesty International publie aujourd'hui et que chacun peut consulter ou télécharger.

Ce rapport est intitulé France : Des policiers au-dessus des lois.

En voici la quatrième de couverture:

Insultes racistes, recours excessif à la force, coups, homicides illégaux – telles sont les allégations de violations des droits humains commises par certains policiers français.

Ce rapport révèle un système qui favorise l’impunité des policiers accusés de ces actes. Les enquêtes internes par les organes chargés de faire respecter la loi ne témoignent pas d’une indépendance et d’une impartialité suffisante. L’organisme qui reçoit les réclamations concernant les manquements des policiers ne dispose pas des moyens nécessaires pour mettre en œuvre ses recommandations. Au sein du parquet comme dans la magistrature, les procédures relatives aux
plaintes déposées contre la police ne sont généralement pas menées de façon efficace. Souvent, les victimes qui essaient de se plaindre sont accusées en représailles d’avoir commis un délit d’« outrage » en insultant les policiers. Dans ces circonstances, justice n’est pas rendue aux victimes de graves violations des droits humains.

Les policiers exercent un métier difficile, et se voient imposer des tâches de plus en plus lourdes. Mais le système actuel nuit à la confiance de la population. Les actes répréhensibles d’une minorité de policiers rejaillissent sur la réputation de l’ensemble des organes chargés de faire respecter la loi. Il est temps que la justice soit accessible à tous.

Il est rédigé dans ce style inimitable qui est celui d'Amnesty...

Un style clair, précis et juste.



* Décédé des suites de son interpellation à Grasse le 9 mai 2008.

2 commentaires:

Scalp a dit…

Pour un bref communiqué, écrit depuis le Centre de Convergence Molodoï de Strasbourg, sous les pales des hélicos de combat et l'incessant ballet flicard des BACs de toute la France:

http://scalp-reflex.over-blog.com/article-29774557.html

On ne sait pas encore à quel "style anti-émeute" on va être mangé-e-s...

Guy M. a dit…

Allons, allons, ils n'ont pas encore touché une nouvelle tenue...