Depuis quelque temps déjà, il m'est venu comme un genre de fierté dans les articulations, et la pratique de la génuflexion m'est désormais bien incommode. Je ne m'agenouille plus qu'occasionnellement devant un tout petit, s'il entreprend de vouloir discuter avec moi. Pour se parler, ne serait-ce que par grimaces et sourires, il est en effet préférable que nos regards puissent se croiser dans le même plan horizontal.
Hier matin, je ne me suis donc pas rendu devant l'hôpital Tenon, dans le XXe arrondissement de Paris, pour rejoindre les sympathisants de SOS Tout-Petits qui avaient prévu d'y réciter leur bout de rosaire expiatoire mensuel. C'est une mauvaise habitude qu’ils ont prise de se donner ainsi en spectacle afin de réclamer, en vrac mais non sans détermination,
- Dieu dans la cité,
- le respect des plus faibles dès le commencement de la vie,
- une politique familiale véritable et un enseignement digne de ce nom,
- le salaire parental,
- une facilité plus grande d'adoption,
- l'abrogation des lois permettant le meurtre et la perversion des mœurs,
tout en condamnant, avec la plus extrême vigueur,
- la « culture de mort » (Jean-Paul II Evangelium vitae – 25 mars 1995)
- la « dictature du relativisme » (Benoît XVI en Angleterre – septembre 2010).
Cette bouillie revendicative assez confuse est tirée du tract appelant à cette performance de rue.
A la réflexion, l'en-tête, reproduit ci-après, me laisse plutôt songeur...
La formule initiale, "De la conception à la gestation", suivie d'un "SOS TOUT-PETITS" en caractères gras, majuscules, pathétiques, m'incite à penser que nous n'avons pas, eux et moi, la même idée du tout petit...
Comme si, pour eux, passées la conception et la gestation, les vénérés "tout-petits" pouvaient bien crever ; Dieu, qui a l'habitude, y reconnaîtra les siens.
En arrivant devant l'entrée de l'hôpital, j'appris que pour la réunion de prière la messe était dite. La démonstration pénitentielle avait été interdite, ce qui expliquait l'important dispositif policier que j'avais rencontré en chemin. Chaque intersection était gardée par de petits groupes de CRS, apparemment peu armés mais équipés de leurs carapaces, afin, probablement, de se protéger des coups de chapelets plombés.
Pendant qu'arrivaient les membres et les soutiens du collectif Tenon - dont le rassemblement était autorisé -, une escouade réduite se plaça résolument devant une banderole accrochée aux grilles. A voir leur air déterminé, on sentait bien qu'il faudrait les réduire en pâtée à coups de crucifix avant de pouvoir la lacérer. Ils préféraient, cependant, ne pas être photographiés, redoutant de se retrouver sur les sites où l'on répertorie des policiers avec leurs photos, leurs adresses et celles des écoles de leurs enfants, etc. Ils me le demandèrent assez gentiment pour que j’obtempère, sans même prendre des nouvelles des enfants...
Après avoir acheté, à l'angle de la rue Belgrand, une poignée de macarons à l'ancienne – rien à voir avec les chichiteuses pâtisseries à la mode –, je me décidai à rejoindre la place Gambetta. La sortie du métro était bien surveillée, et j'y vis même un de mes contemporains y subir une palpation courtoise, qu'il me fallut bien supposer être réglementaire, suivie d'une fouille assez minutieuse du contenu de son sac. Sans doute n'y avait-t-on pas trouvé de redoutable bible blindée, puisque je pus le voir repartir en direction du marché, souriant, tout de même, sous sa moustache. Il devait s'amuser de se découvrir un faciès d'intégriste catholique.
De l'autre côté de la mairie, vers l'avenue Gambetta, des partisans du Che(vènement), réunis en groupuscule activiste, distribuaient des tracts détaillant son programme européen en quarante points. Pas un de plus.
Je m'installai à une terrasse pour grignoter mes macarons avec un café, et pus assister à l'arrivée d'une radieuse jeune mariée entre deux âges et en robe blanche. Elle sembla un peu surprise de devoir s'avancer sous une si impressionnante protection policière, mais ne se départit point du sourire qu'exigeaient les circonstances.
Fallait-il, puisqu'elle se mariait, lui souhaiter beaucoup d'enfants ?
Si elle veut, quand elle veut, où elle veut.
4 commentaires:
J'aime bien le "Benoît XVI en Angleterre – septembre 201". Ça donne une idée assez précise du Grand Rétropédalage contemporain.
Ooooops, c'est ma faute, c'est ma faute et c'est ma trrrrrès grande faute !
Je corrige tout de suite.
Illico presto et cum spiritu tuo...
Quitte à blaguer latin, je préfère la coupe à la coulpe ...
Vinum et musica laetificant cor !
D'abors et même que .
Le latin est une belle langue.
On dit même que le nom latin des fleurs peut laisser sans voix une chanteuse qui n'en a pas.
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