lundi 14 novembre 2011

Renvoi gastro-culturel

J'ai toujours eu un peu de mal à prendre au sérieux monsieur Luc-Marie Chatel, dit Luc Chatel, dans son rôle de Ministre de l'Éducation nationale, de la Jeunesse et de la Vie associative...

A chacune de ses apparitions, je ne pouvais m’empêcher d'évoquer l'opinion soutenue, en mai ou juin 1968, par l'un de mes anciens maîtres qui prétendait que seuls deux dispositifs de l'enseignement français remplissaient complétement leurs rôles dans la transmission des connaissances. C'étaient, selon lui, le collège de France et l'école maternelle (1).

En somme, monsieur Luc Chatel m'imposait l'image de la parfaite réussite de cette dernière institution.

Il me faut déchanter.

Un peu comme ça, limite dissonant...
(Leoš Janáček, Dans les brumes IV, 1912)

On sait que le ministre a eu quelques difficultés à justifier son niveau de CM2. Mais il vient, et c'est plus grave, de montrer d'inquiétantes lacunes dans les connaissances raisonnablement exigibles à l'entrée en CP en tentant de comparer le roi Babar à monsieur François Hollande (2):

Il y a un personnage de bande dessinée qu'on connaît bien, qui s'appelle Babar. Babar, il est sympathique, c'est le roi des éléphants. C'est l'histoire qu'on raconte aux enfants pour les endormir le soir.

En s'exprimant en ces termes, il montre justement qu'il connaît bien mal Babar, personnage de conte illustré plus que de bande dessinée. Comme on le remarque ici ou là, soit il ne l'a jamais lu, soit il l'a lu et n'y a rien compris...

En revanche - car il y a du ton revanchard chez lui -, le petit Luc-Marie défend bien son admiration pour Astérix, en des termes très communicants, tout à fait compréhensibles par ses petits camarades :

Il y a Babar d'un côté. Moi je préfère Astérix, voyez. Astérix, c'est celui qui est courageux, celui qui est déterminé, celui qui est protecteur, celui qui sait prendre des décisions. Et puis Sarkozy, il gagne toujours en plus.

Nananère !

Étude pour l'Histoire de Babar le petit éléphant,
par Jean de Brunhoff, 1931.
(The Morgan Library & Museum.)

La référence culturelle, même dans le domaine de la littérature enfantine, n'est pas une spécialité des sarkoziens, on le sait.

On dirait que tout cela, mal digéré, leur pèse un peu sur l'estomac et qu'ils souffrent de renvois mal contrôlés.

Qu'ils se rassurent, c'est le Figaro qui nous en avertit :

Régurgitations du nourrisson : pas d'inquiétude

(...) Ces régurgitations sont en effet liées à l'immaturité du système antireflux qui se résout, dans la plupart des cas, avec le temps. (...)

On ne saurait mieux dire.


(1) Cette opinion n'est évidemment plus soutenable en ce qui concerne l'école maternelle. Monsieur Chatel y a déjà bien travaillé et n'exclut pas de continuer...

(2) Le roi Babar devrait se relever de cette basse attaque. Il en a vu d'autres.

2 commentaires:

Olivier a dit…

Ces époques de campagne sont vraiment le repère de toutes les bassesses possibles.
Déjà qu'ils sont habitués à pratiquer cet exercice tout au long de l'année, c'est dire le haut-niveau de croche-pattes réservé à ces douces périodes.

Guy M. a dit…

Cette culture de l'insulte qui se veut gentillette est en plein essor chez les dirigeants européens.