Afin de participer au dernier chic de la polémique, celle déclenchée, le mois dernier, par le "mur" Facebook de monsieur Pierre-André Taguieff, madame Catherine David a eu la très riche idée de publier un court article intitulé, avec beaucoup de légèreté et de subtilité, Sakineh et Hessel, même combat.
On s'étonne tout de même un peu qu'il ne soit trouvé personne, à la rédaction du Nouvel Observateur, qui a publié ce "coup de sang" (sic) de madame David, pour simplement refuser de laisser passer ce titre nullissime, et l'article qui allait avec. La lecture de ce texte montre en effet que, malgré une certaine tendance au délayage, il est tout aussi nuancé, et surtout aussi pertinent, que le titre choisi.
Peut-être était-il urgent et important que le Nouvel Obs entre dans cette polémique prometteuse, de quelque manière que ce soit, fût-ce en pataugeant dans les amalgames les plus vaseux...
De ce point de vue, c'est une grande réussite, et madame David est en passe de devenir une célébrité.
A l'origine de sa grande colère, il y a ce que l'on aurait vu sur le désormais fameux "mur" Facebook de monsieur Pierre-André Taguieff.
Cette épigramme voltairienne traficotée:
Un soir au fond du Sahel,
Un serpent piqua le vieil Hessel,
Que croyez-vous qu'il arriva,
Ce fut le serpent qui creva.
Et ce commentaire:
"Quand un serpent venimeux est doté de bonne conscience, comme le nommé Hessel, il est compréhensible qu'on ait envie de lui écraser la tête."
L'humour de monsieur Pierre-André Taguieff et de ses amis de Facebook est tout à fait charmant.
Mais fut assez peu apprécié, et pas seulement par notre bonne madame David.
Que croyez-vous qu'il arriva ?
Ce fut Taguieff qui pleurnicha !
(Pardonnez-moi, j'ai déplacé le rythme et affaibli la rime... Mais tout le monde ne peut avoir le talent de monsieur Taguieff.)
Sa réponse à madame David, publiée dans le Nouvel Obs, qui, par le jeu des réponses aux réponses, initie un "débat" d'un intérêt fort médiocre, est introduite par un modèle de prose pleurnicharde de la plus belle eau.
Je ne m'en lasse pas :
J'avoue avoir été blessé par votre article sur BibliObs, stupéfié par la virulence de vos attaques, et aussi très étonné : comment avez-vous pu vous contenter de reprendre, sans y regarder de plus près, des attaques contre moi venant de milieux communistes, islamistes et «antisionistes» professionnels? Faire confiance à de douteux délateurs? Et ce, alors que je fais l'objet d'une véritable chasse à l'homme lancée par diverses officines? Qui est pourchassé dans cette affaire? Qui est mis au pilori? Et qui est encensé d'une façon aveugle et unanime, si ce n'est Stéphane Hessel? Faire passer aujourd'hui l'«icône» Hessel pour une victime relève du tour de force. Il n'est pas de figure «morale» aussi adulée et encensée dans l'espace médiatique. Ma situation est tout autre. Mais j'imagine que vous n'en avez aucune idée. Savez-vous que mes employeurs sont assaillis d'appels téléphoniques orchestrés, selon des tactiques d'inspiration maccarthyste, demandant des sanctions professionnelles contre ma personne? Que j'ai dû annuler toutes mes interventions publiques dans des lieux universitaires, compte tenu des menaces et des risques de «désordre»?
Malgré l'émotion compassionnelle qui vous étreint, il faut continuer pour découvrir que monsieur Taguieff ne saurait confirmer ce qui a été lu, il semble, sur son "mur" Facebook, car il a "supprimé rapidement tout le passage".
"Si j'ai supprimé le passage, c'est précisément parce que je pensais que la dimension littéraire de la satire ne serait pas perçue et que la métaphore polémique serait malencontreusement prise à la lettre."
Et pour bien montrer qu'il nous prend pour des demeurés, car cela non plus nous aurions pu ne pas le comprendre, notre auteur cite l'épigramme de Voltaire sur Fréron et nous explique que "non sans effronterie", il a substitué "Hessel" à "Fréron".
C'est vraiment gracieux de sa part. Nous n'aurions pu ne pas saisir le sel de son "effronterie", tant il est vrai que nous allons rarement aussi loin dans la "dimension littéraire"...
Sans parler de cette curieuse "envie de lui écraser la tête", qui a pourtant été le moteur initial des calamiteuses associations d'idées de madame David, monsieur Taguieff tente de revenir à son désaccord avec Stéphane Hessel, portant sur les "positions anti-israéliennes, de plus en plus radicales" de celui-ci. Il cite alors un des gribouillages (non privé, celui-là) de son "mur":
"Il aurait certainement pu finir sa vie d'une façon plus digne, sans appeler à la haine contre Israël, joignant sa voix à celles des pires antijuifs. Même le grand âge ne rend pas imperméable à la vanité, et ne met pas fin au goût d'être applaudi."
En plus de la "métaphore polémique" que nous avons tant de mal à comprendre, monsieur Taguieff peut aussi pratiquer le poncif dédaigneux envers le "grand âge".
Notre "sommité mondiale de l'histoire des idées et chercheur au CNRS", comme le présentent certains de ses amis, ne saurait terminer cette première réponse sans faire allusion aux deux attaques ad hominem qu'il développe depuis quelques temps en direction de Stéphane Hessel:
Tout ce que j'ai affirmé concernant certains faits de la vie de l'ancien diplomate (son statut de déporté politique alors qu'il est donné pour un «rescapé de la Shoah», sa pseudo-participation à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l'homme, etc.) est fondé sur une lecture critique de ses propres témoignages (le problème, c'est qu'il varie beaucoup dans ses déclarations !), recoupés avec d'autres sources d'information.
En post-scriptum, monsieur Pierre-André Taguieff, après avoir incidemment précisé avoir écrit cette réponse "malgré les incitations de [s]on avocat" a l'extrême obligeance de nous renvoyer vers la pétition que ses amis ont mis en place pour le soutenir dans cette rude épreuve, et vers les sites du Crif, de la revue RING et du Causeur où l'on appelle à "sauver le soldat Taguieff"....
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