Inutile de se demander jusqu'où peut aller l'acharnement des barbares en costard-cravate, et de leurs mercenaires en uniforme: avec eux, qui font les lois et les appliquent, il n'y a plus de limites.
L'histoire l'a appris à tous ceux qui savent comparer les incomparables.
Pour les autres, qu'ils s'arrêtent un peu, l'esprit libre, à ce que l'on a imposé depuis des semaines et des semaines, et à ce que l'on impose, aujourd'hui, à Guilherme Hauka-Azanga, à sa compagne Florence et à leurs enfants Exaucée, Chloé, Gaël et Dorcas.
Il suffit d'aller sur la page du site du RESF, où se trouvent tous les liens du dossier de presse.
La situation de Guilherme est résumée à grands traits dans cette lettre qui a été remise à madame Simone Veil, le 6 avril, au Mémorial d'Izieu:
Madame Simone Veil,
C’est parce que vous avez toujours su incarner la lutte pour la justice et les droits de l’homme que nous vous sollicitons aujourd’hui en urgence en faveur de notre voisin et ami, Guilherme Hauka-Azanga, père de famille angolais menacé d’expulsion imminente vers un pays où sa vie est en danger en raison de ses combats pour la défense de la minorité ethnique à laquelle il appartient.
Monsieur Hauka-Azanga a en effet quitté son pays en 2002 après avoir échappé au massacre de tout son village, auquel sa mère et sa fratrie ont succombé. Ne pouvait emmener sa compagne et leurs cinq enfants hors du pays, il les a confiés à une autorité religieuse, alors qu’il choisissait comme terre d’asile la France, où il espérait pouvoir faire venir sa famille.
En 2004, sa compagne angolaise a été tuée par balle et ses deux plus jeunes enfants ont disparu. Les trois aînés ont pu être accueillis au Congo, où ils sont élevés par une famille d’accueil. Monsieur Hauka-Azanga est en contact régulier avec eux et leur envoie régulièrement un mandat.
Il vit depuis cinq ans avec Madame Maweté avec qui il a deux enfants, Gaël trois ans, et Dorcas quinze mois, et dont il élève aussi les deux filles aînées.
N’ayant pu présenter à temps les documents nécessaires, ses demandes d’asile et ses recours ont été rejetés.
Il est actuellement en rétention et menacé d’une expulsion imminente.
Nous sommes des voisins, amis et parents d’élèves le côtoyant quotidiennement depuis plusieurs années et nous ne pouvons pas supporter de voir détruire cette famille et envoyer cet homme à un destin funeste.
Nous vous supplions instamment, Madame, au nom des valeurs de justice et d’humanité que vous avez toujours défendues, de nous aider dans notre combat, en intervenant auprès de qui de droit.
Nous vous prions de bien vouloir agréer, Madame, l’expression de nos sentiments les plus respectueux.
Signé: Sandrine Delanoë et Annabelle Billaud pour le comité de soutien à Guilherme Hauka Azanga voisins et parents d’élèves de l’école Gilbert Dru, à Lyon 7e.
Je ne sais pas si madame Veil a reçu cette lettre en main propre, et si elle a donné une réponse...
«Ils se sont tous inscrit un G majuscule sur la paume de la main.
Comme Guilherme, comme Garde espoir.»
(Lettre de Léah Touitou, auteur/illustratrice, à lire ici.)
C'est à partir de janvier 2010 que Guilherme est devenu la proie de chasseurs acharnés.
Le 2 avril, on pouvait lire ce récit sur le site du RESF:
· En 2009, la préfecture refuse de donner un titre de séjour à Guilherme
· En janvier Guilherme est arrêté à domicile. Le 30 janvier, il refuse d’être expulsé. Il ne veut pas laisser sa femme et ses enfants.
· Guilherme est alors condamné à deux mois de prison pour refus d’embarquement.
· 18 mars, il sort de prison… mais pour être mis directement dans un avion pour l’Angola via Francfort. Il est bâillonné et ligoté.
· A Francfort, le pilote refuse de partir avec un passager sous contrainte.
· Guilherme est rapatrié en France par la police, à nouveau enfermé au centre de rétention de Lyon St Exupéry.
· Samedi 20 mars, le juge des libertés libère Guilherme. : Guilherme retrouve Florence et les enfants. C’est la joie
· MAIS, mardi 23 mars la préfecture de LYON fait appel de la décision de libération. La décision de libération est cassée. Guilherme n’a pas été prévenu, le jugement s’est fait sans lui.
· Jeudi 25 mars, grand déploiement de police vers 8 h 30. Après avoir cassé la porte de l’appartement familial, la police embarque Guilherme.
· Guilherme est alors à nouveau enfermé au CRA de Lyon Saint Exupéry. Une demande d’asile est déposé.
· Le 31 mars, cette demande est rejetée. Guilherme peut-être expulsé à tout moment.
Et ça continue, et ça continue...
Le dimanche 4 avril, Guilherme est présenté devant le JLD. La préfecture demande une prolongation de la rétention de cinq jours avec expulsion prévue pour le lundi de Pâques.
La juge déclare "irrecevable" cette demande, mais dans la soirée le ministère public fait appel de cette décision. Cependant, puisque le président du tribunal demande que Guilherme reste à disposition de la justice et qu’il soit présent à l’audience en appel le mardi, son expulsion ne peut avoir lieu le lundi soir comme prévu.
Mardi 6 avril, la cour d’appel de Lyon autorise la préfecture du Rhône à prolonger jusqu’à vendredi la rétention de Guilherme "afin d'organiser son retour".
(Photo de Bertrand Gaudillière, membre du collectif ITEM.)
Hier, une nouvelle tentative d'expulsion est organisée. Guilherme est emmené du centre de rétention administrative jusqu'à l'aéroport de Bron, et de là embarqué à Roissy, où il doit être "chargé" sur le vol AF 928 pour Luanda, prévu à 22h 05.
Selon les informations de ses soutiens, Guilherme "avait une camisole de force et une muselière", et le commandant de bord a refusé d'embarquer un homme ainsi entravé.
La barbarie n'est pas passée par lui.
On aurait pu s'attendre à ce que Guilherme soit présenté devant le tribunal de Bobigny pour avoir refusé cette aimable "reconduite à la frontière".
Mais non, les barbares en costard-cravate ont fait un autre calcul: une nouvelle tentative d'expulsion, et par une autre voie.
Aujourd'hui, c'est par Le Bourget, et dans un avion "spécialement affrété", que l'on tente d'expulser Guilherme.
En vain, encore une fois.
Une dernière fois ?
Lyon 1 ère publie cette brève:
Constatant l'impossibilité matérielle de faire procéder à la reconduite à la frontière de Guilherme Hauka Azanga à destination de son pays, l'Angola , le Préfet du Rhône prend acte ce soir de cette situation . Dans ces conditions, il décide de...
mettre fin à sa rétention dès ce soir... Hauka Azanga devrait donc retrouver sa femme et ses enfants dans les prochaines heures...
Des centaines de mains, portant inscrit dans leurs paumes un G majuscule, G "comme Guilherme", G "comme Garde espoir", se sont tendues, en signe de solidarité avec Guilherme Hauka-Azanga, sa compagne Florence et leurs enfants Exaucée, Chloé, Gaël et Dorcas.
Elles n'ont pas fait reculer la barbarie administrative et policière qui s'est acharnée contre eux. Il ne faut pas rêver...
Mais elles l'ont suspendue un moment, lui ont fait baisser les bras; et elles sont surtout le signe visible de ce magnifique mouvement collectif qui s'est construit autour de cette famille.
(Photo extraite de la galerie "Journée de jeudi".)
... et tard dans la nuit.
(Galerie "Des papiers pour Guilherme")
12 commentaires:
Nul de ma part mais j'ai pas pu envoyer la mienne, de photo : mon appareil a sombré dans le coma…
Fallait-il qu'on inflige tant de souffrance supplémentaire à cet homme ?
Bise, monsieur Guy
La machine à expulser est devenue folle...
La machine à expulser est devenue folle et elle doit faire du chiffre !et assurer la carrière du ministre concerné . Joli le "G" de mains.
Une folie furieuse !
«Pour que la peur change de camp...»
Comme tu le soulignes dans le billet précédent, la "personne" (appelons-ça comme ça) qui a dit ça est un conseiller en communication.
Un métier qui consiste à tordre la parole et les mots eux-mêmes, et le corps et l'esprit de tous ceux qui s'acharnent à rester en vie pour apprendre à leurs enfants à les prononcer comme s'ils avaient encore un sens vivifiant.
Une fois bien en place cette folie tordue, sa peur, ses camps, il n'y a plus qu'à protéger de ses effets inopportuns, à l'aide de muselières et de camisoles, tous les gens normaux qui ont des rêves normaux — comme ça au hasard : offrir en toute tranquillité un diamant (d'Angola via l'avenue Montaigne) à leur bien-aimée pas affolée, pas malade, pas assassinée. Cool.
Ce commentaire d'angoisse n'aidera personne efficacement. Tu peux l'effacer si tu veux.
Ce n'est pas ce type de commentaire que tu dis d'angoisse que l'on efface.
On le lit et relit, car pourquoi faudrait-il immédiatement transparent.
Et on dit "merci".
Dire merci à l'angoisse ?
Euh...
... à l'auteure du commentaire, pour avoir posé des mots sur ce qu'on ressent également.
Quelquefois, il est d'heureuses nouvelles. Pour le principal intéressé, évidemment. Mais pour nous aussi, puisque c'est une très jolie preuve qu'ils ont beau faire, ils n'arriveront jamais tout à fait à imprimer sur notre monde leur ordre malsain. Il restera toujours des gens pour crier, gueuler, dire "non". C'est plus que rassurant : salutaire.
Pendant que Guilherme (et Florence) arrivaient à souffler un peu (mais la bataille n'est pas terminée...), une jeune femme de 34 ans, enceinte de 5 mois, était amenée à se cacher:
http://www.sudouest.fr/2010/04/07/drissia-se-cache-58964-2019.php
http://www.libebordeaux.fr/libe/2010/04/enceinte-et-frapp%C3%A9e-la-gendarmerie-lui-offre-une-reconduite-%C3%A0-la-fronti%C3%A8re.html
http://www.libebordeaux.fr/libe/2010/04/drissia-obtient-en-urgence-un-titre-de-s%C3%A9jour.html
Encore une bonne nouvelle...
Faut vraiment avoir pas le moindre sens de l'humanité pour piquer son passeport à une femme enceinte qui vient déposer plainte pour violences. Juste être un moins que rien.
Sans compter que le truc qui nous sert de président a quand même déclaré : "A chaque femme martyrisée dans le monde, je veux que la France offre sa protection en lui donnant la possibilité de devenir française."
Si j'ai bien compris, Drissia ne venait pas déposer plainte, mais demander une intervention "à l'ancienne", une sorte de rappel à la loi informel, de la part des gendarmes...
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