jeudi 18 juin 2009

La BnF honore Philippe Sollers

Un histrion saint-sulpicien bien connu du grand public, monsieur Philippe Sollers, vient d'encaisser les 10 000 euros du premier prix de la BnF (Bibliothèque nationale de France) qui lui a été attribué pour l'ensemble de son œuvre. Le montant du chèque n'est pas très élevé, mais on sait que le maître a des goûts relativement simples, puisque ce sont les goûts du jour: seul son aveuglement caractériel a pu lui faire croire, à l'époque où il se croyait d'avant-garde, qu'il les précédait ou les infléchissait.

Ce nouveau prix littéraire, créé à l’initiative de Jean-Claude Meyer, président du Cercle de la BnF, pour récompenser un auteur vivant de langue française ayant publié dans les trois années précédentes, s'accompagne d'une bourse de recherche de 5 000 euros, non encore attribuée, qui devrait soutenir le travail "de haut niveau" d'un larbin universitaire sur l'œuvre du lauréat.

Je ne sais si monsieur Philippe Sollers participera au choix de ce lauréat satellite. Mais cela me semble raisonnable: qui mieux que lui pourrait juger de la qualité de la flagornerie ?

Le jury, présidé par Bruno Racine, président de la BnF et écrivain, était composé de neuf membres: Jean-Claude Meyer, vice-président de la BnF, Laure Adler, Jean-Claude Casanova, Antoine Compagnon, Marc Fumaroli, Edouard Glissant, Colette Kerber, Julia Kristeva et Alberto Manguel.

On voit que la littérature vivante était représentée avec un discernement homéopathique.

Heureusement, la présence dans le jury de madame Julia Kristeva, épouse Sollers, était une garantie d'impartialité maximale.

Monsieur et madame en plein délire maoïste, 1974.

Ce prix fut remis à notre grand écrivain à l'occasion du deuxième dîner des mécènes, organisé par la BnF. Ce petit en-cas à 500 euros réunissait, dans le cadre prestigieux du hall des Globes, environ deux cents personnes.

Vous pourrez découvrir quelques noms dans l'article du Monde.

Vous apprendrez aussi que l'arrière pensée des organisateurs de ce banquet était de réunir des fonds afin d'acquérir les archives de Guy Debord qu'Alice Becker-Ho, veuve Debord et exécutrice testamentaire du de cujus, n'a pas l'intention de donner à l'Etat ou à une fondation quelconque. Selon Alain Beuve-Méry, ces archives sont difficiles à estimer, mais dépassent plusieurs centaines de milliers d'euros, et la BnF ne les possède pas dans ses tiroirs. Madame Albanel non plus, d'où cette opération gastronomique de mendicité de luxe afin de trouver de l'argent.

Pour allécher les convives, trois cahiers à spirale, deux à petits carreaux, un à grands carreaux, avec le trait rose qui sépare la marge, étaient exposés durant le dîner. Classés "Trésor national", ils forment le manuscrit de La Société du Spectacle, de Guy Debord. Le texte est surchargé d'annotations à l'encre bleue ou noire et se lit en suivant des paragraphes soigneusement numérotés, qui indiquent les pages du livre à venir.

Peu importe que ce brave Alain Beuve-Méry s'emmêle un peu les crayons, bleus ou noir, dans les numéros de sections et les numéros de pages...

Il n'a peut-être pas connu Debord vivant...

C'est assez cosmique, surtout si on imagine Sollers en train de baratiner ses voisines de table.

Peu importe que le montant nécessaire à l'acquisition du fonds Debord soit réuni ou non - après tout les universitaires étasuniens peuvent tirer autant de profit de ces archives que les universitaires français -, le spectacle de la veule prostitution que nous offrent madame Albanel et monsieur Racine, avec l'appui photogénique de monsieur Sollers, peut suffire à notre bonheur.

Les mots immortels que l'honoré écrivain s'est cru obligé de prononcer n'ont malheureusement pas été retranscrits par Alain Beuve-Méry. Il nous indique seulement que ce fut "l'occasion pour Sollers de rendre hommage au 'lecteur exceptionnel' que fut Guy Debord", ce qui est peu, mais tout de même amusant, si l'on se remémore la trace laissée chez Debord (dans "Cette mauvaise réputation...", 1993) par une lecture assez vite expédiée de notre baudruche littéraire:

Dans L'Humanité du 5 novembre 1992, (...), il y a même quelques éloges à mon propos. Mais ce n'est qu'insignifiant, puisque signé Philippe Sollers.

C'est finalement assez bien vu.


PS: Signalons, aux admirateurs inconditionnels de monsieur Philippe Sollers, que sa divine présence est prophétisée pour le soir du 1er juillet, au Collège des Bernardins, 20 rue de Poissy, dans le cinquième arrondissement de la capitale, pour une conférence sur Le catholicisme de Dante.

Le lieu est d'une grande beauté, je vous conseille plutôt d'y entrer, mine de rien, pour vous promener, quand monsieur Sollers n'y sera plus.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Pauvre Sollers , habillé pour plusieurs hivers , ce " bel hommage " est -il mérité ? Je n'ai jamais eu envie de le lire ,donc peu objective sur l'individu qui m'énerve dès qu'il émet un son .

Guy M. a dit…

A mon avis, il n'y a pas grand chose à lire chez Sollers. Malgré mes efforts, ses livres me tombent des mains.