lundi 22 juin 2009

Contrôle net et sans bavure

Le 9 juin 2009, le dernier court voyage qu'aura effectué de son vivant monsieur Ali Ziri aura été un voyage vers l'hôpital. C'est assez banal.

Ce qui l'est moins, c'est de le faire dans une voiture de police, menotté et évanoui, à la suite d'un contrôle, par la police, d'un véhicule conduit par monsieur Arezki K., dont monsieur Ali Ziri était passager.

Ali Ziri est né en 1940 à Ouled Rached, un village dans la wilaya de Bouira, en Algérie (Kabylie). Il est arrivé en France à l'âge de 19 ans, s'est installé à Argenteuil où vit une assez importante communauté kabyle, et il a travaillé près de 40 ans dans une même société du 17ème arrondissement de Paris. En retraite, il passait une partie de son temps à faire des allers-retours entre la France et l'Algérie où résidait sa famille composée de deux filles et deux garçons. Il s'apprêtait à retourner dans son pays le lundi 15 juin pour assister au mariage de son fils aîné.

Il n'était pas connu, comme on dit, des services de police; mais, dans son quartier, à Argenteuil, il était bien connu pour sa gentillesse, sa disponibilité et sa générosité. Les gens du foyer et les jeunes le surnommaient affectueusement "Ammi Ali", c'est-à-dire "Oncle ou Tonton Ali".

Apparemment, ce n'est pas ainsi que les policiers qui l'ont fait monter dans leur véhicule, en compagnie de monsieur Arezki K., l'ont surnommé.

C'était peut-être un véhicule de ce genre,
mais il y a d'autres modèles.


On retrouve une certaine banalité en constatant que les faits se racontent de deux manières assez différentes...

Commençons par la version officiellement donnée par le procureur adjoint au parquet de Cergy-Pontoise, monsieur Bernard Farret, dont les déclarations sont reproduites dans l'article d'Elsa Vigoureux, dans la NouvelObs.com.

"Les deux hommes étaient en état d’ébriété au moment de leur interpellation. Ils ont été embarqués au commissariat parce qu’ils se rebellaient et outrageaient les policiers. Ali Ziri, transporté à l’hôpital, est décédé après être tombé dans le coma". (...) "l’autopsie de monsieur Ali Ziri exclut que la cause du décès puisse résulter d’un traumatisme, et conclut qu’elle est due au mauvais état de son cœur"

Monsieur Bernard Farret s'exprimait surtout pour faire savoir à la presse, et donc au public, que le parquet n’a pas souhaité donner suite à cette affaire, puisqu’il n’y a "pas de suspicion de bavure".

D'un mot, il écarte toute crédibilité au témoignage d'Arezki K. :

"La réalité n’a rien à voir avec ce que raconte ce monsieur Arezki K."

C'est net et sans bavure.

Bavure de lego police, par ludoboss.

"Ce que raconte ce monsieur Arezki K.", autrement dit son témoignage, on peut le lire dans un article de la Dépêche de Kabylie, et on le retrouve dans le communiqué du collectif "Vérité et justice pour M. Ali Ziri" qui s'est formé à Argenteuil (le lien qu'on m'a indiqué ne fonctionne pas).

Pour motif de contrôle d’identité, les trois policiers ont d’abord demandé au conducteur ses papiers. Mais celui-ci “a eu le tort de ne pas les sortir 'assez vite' comme il lui a été demandé par conséquent, il s’en est suivi des menaces afin de l’emmener au poste, puis des insultes...” et enfin, “des menottes et des coups, une fois que le conducteur a été arraché de force de son siège!” Tandis que son ami, Ali Ziri, était jusqu’à cet instant assis gentiment sur le siège avant du véhicule, et voyant son ami, Arezki, “se faire traîner par terre et se faire insulter de tous les noms”, il descend du véhicule pour calmer les policiers. “Laissez-le tranquille, vous n’avez pas le droit de le frapper et de le traîner par terre. Je connais la loi”, dira Ali aux policiers. Pis encore, les policiers se saisirent de lui et le menottèrent à son tour ! Les deux individus sont alors “traînés et poussés avec violence” à l’intérieur du fourgon policier.

Les coups, et les insultes, auraient, selon le témoin, continué à l'intérieur du fourgon, jusqu'à l'évanouissement d'Ali Ziri.

A l'arrivée à l'hôpital d'Argenteuil, il était mort.

Selon le communiqué:

Mis en garde-à-vue, pendant 24 heures, Arezki K., n'apprendra le décès de son ami que le jeudi 11 juin par des policiers du commissariat d'Argenteuil. Le conducteur affirme avoir fait l'objet d'un tabassage continu, au même titre que son ami Ali Ziri, alors qu'ils étaient tous les deux menottés. Le médecin traitant d'Arezki K. ainsi que celui de l'hôpital lui ont d'ailleurs prescrit un arrêt de travail de huit jours. Les proches et les amis du défunt, qui se sont rendus à l'hôpital d'Argenteuil, ont tous constaté que plusieurs coups étaient visibles sur le corps de la victime.

Incidemment le NouvelObs nous indique que "Arezki K souhaite déposer plainte, mais la gendarmerie puis le commissariat de Bezons lui auraient refusé ce droit." et nous apprend que "L’ATMF entend se constituer partie civile dans cette affaire." (L'ATMF est l'Association des Travailleurs Magrébins de France, le NouvelObs.com confond "Maghrébins" et "Marocains"...)

Des proches du défunt, des associations, des partis politiques et des citoyens d'Argenteuil, se sont regroupés pour former un collectif demandant que tout soit fait pour élucider les circonstances exactes qui ont conduit à la mort de monsieur Ali Ziri.

Ils appellent à une marche pacifique, pour réclamer la vérité et la justice, le mercredi 24 juin, à 18 heures:

Le cortège partira du foyer Sonacotra Les Remparts, 4, rue Karl Marx, près de la gare du centre d'Argenteuil, pour se rendre sur le lieu de la mort de M. Ziri, au croisement des rues Jeanne d'Arc et du boulevard Léon-Feix et se terminer au commissariat d'Argenteuil...

8 commentaires:

kristall a dit…

C'est quand même grave, la mort d'un vieillard de 69 ans...que ce soit de la canicule ou chez la police!!!
Il faut que la vérité soit connue par une enquête neutre et impartiale!!!
Enfin, une pensée à la victime et condoléances à sa famille et surtout à son fils Rachid qui l'attendais avant de se marier!!!
Où est la loi dans notre pays de droits de l'homme ou doit-on remettre en cause le rapport d'Amnesty internationale sur notre police? où est la justice?

Guy M. a dit…

On n'est peut-être pas encore un vieillard à 69 ans, et après une vie de travail, mais on est, dans certaines cultures, un peu plus respectable.

Il semble bien que nous l'ayons aoblié.

Abie a dit…

Juste une précision : les policiers et les gendarmes ne sont pas autorisés à prendre des plaintes à l'encontre des "collègues". Il faut aller à l'IGS.
( plus de détails dans la deuxième partie de cet article : http://ceciestuntest.over-blog.com/article-27638705.html )

Guy M. a dit…

C'est vrai qu'il ne faut jamais oublier que policiers et gendarmes sont plus égaux que les autres...

(Les détails sont bien utiles, car ce n'est pas au commissariat ou à la gendarmerie qu'on les donne.)

Jérémie Lopez a dit…

quel bande de fumiers !

Guy M. a dit…

Tu veux parler des types du SO de la CGT ?

Jérémie Lopez a dit…

?
Non je veux parler des abruti esclave de l'état, qui se transforme en machine à obéir aux ordres et qui tabasse pour se faire entendre.

Guy M. a dit…

Ah bon!

;-)