Monsieur César est un sage qui préfère être le premier à Rauzan (Gironde) que le second à Bordeaux (Gironde), et cela tombe bien parce que monsieur Juppé, qui est le premier à Bordeaux (Gironde), ne lui a jamais demandé.
Alors monsieur Gérard César, maire de Rauzan, fait aussi le sénateur à Paris, où il se distingue par la pertinence et le mordant de ses interventions, si j'en crois cet extrait du compte rendu intégral des débats de la séance du 13 mai 2009:
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le 30 octobre 2008, vous approuviez en première lecture le projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet, après lui avoir apporté 84 amendements qui l’ont très sensiblement amélioré.
Le 9 avril dernier, vous adoptiez le texte de compromis particulièrement équilibré établi par la commission mixte paritaire. Je ne reviendrai pas sur les circonstances de son rejet par l’Assemblée nationale.
M. Gérard César. Il y avait trop de présents ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
Obtenir des sourires sur les travées de l'UMP, cela compte dans une carrière.
Ce fut sa seule intervention ce jour-là.
Si ce minable petit personnage politique apparaît ici, c'est qu'il a cru bon d'intervenir dans la vie de deux de ses administrés, d'une manière qui a le don de déclencher chez moi des envies d'éviscération virtuelle d'une intensité insupportable, et qu'il a déclaré que l'on avait donné "beaucoup d'ampleur à cette affaire qui ne le mérite pas".
Cette histoire sans ampleur est celle d'un mariage empêché par les bons soins de monsieur César.
Madame G., née E., habitante de Rauzun, et monsieur C., citoyen algérien, se sont rencontrés en janvier 2008, ont décidé de vivre ensemble en juillet 2008 et déposé un dossier de mariage en mairie en décembre 2008.
Très vite, le flair de monsieur César a soupçonné un mariage de complaisance. Il saisit le procureur de la République. Il explique:
"Cette femme est divorcée et a déjà 4 enfants, je trouvais cet empressement à se marier suspect".
Imaginons quels froncements de narines a dû provoquer, chez notre candide petit notable terrien, la célérité des épousailles de son président, deux fois divorcé et père de trois enfants...
Une enquête de gendarmerie est alors diligentée, et ses investigations ne permettent aucune conclusion. Le 25 février 2009, le procureur de Libourne, Eric Maillaud, écrit que les "éléments d'enquête concernant le projet de mariage de Mr.C et de Mademoiselle E., restent insuffisants pour établir le caractère frauduleux de l'union envisagée." Le maire ne peut refuser de publier les bans et de célébrer le mariage, ce que maître Lopy, avocate du couple rappelle fermement par courrier à monsieur César.
Mais la belle âme de monsieur César souffre: le futur époux, qui est en France depuis cinq ans et travaille dans le bâtiment, n'a plus de titre de séjour... Aussi fait-il traîner les choses. Il écrit au ministre de l'Immigration et attend la réponse...
Selon un communiqué de l'Association de Soutien aux Travailleurs Immigrés (ASTI), publié le 7 avril et repris par Aqui.fr:
(...) le couple est ensuite convoqué par téléphone à la gendarmerie de Rauzan quelques jours plus tard. Mme G. s'y présente avec son dernier enfant âgé de 7 mois et est menacée d'être placée en garde à vue et poursuivie pour aide à séjour irrégulier. Afin d'éviter que sa future femme et ses enfants soient séparés et inquiétés plus longtemps, Monsieur R.C. se rend lui-même à la gendarmerie de Bordeaux.
Interpellé, envoyé au Centre de Rétention de Toulouse, monsieur C. est expulsé vers Oran le 7 avril.
"L'Asti donne beaucoup d'ampleur à cette affaire qui ne le mérite pas, simplement parce que je suis parlementaire. Mais, je tiendrai bon", assure Gérard César.
Il semble que si quelque chose manque d'ampleur ici, c'est bien le "parlementaire" César, digne représentant de la petite bourgeoisie viticole bordelaise, avec cet affichage mesquin de sa volonté rabougrie de "tenir bon".
"Droit dans ses bottes", ça devient une spécialité bordelaise.
J'espère que monsieur César n'a pas oublié
d'en informer monsieur Besson.
Face à lui, des gens sans importance, qui ne sont pas parlementaires, ont aussi tenu bon, et le Tribunal de Grande Instance de Libourne leur a donné raison:
Le magistrat estime le refus de l'élu contraire à la loi et constitutif d'une voie de fait. Il le condamne à payer 200 euros de dommages et intérêts au couple, et l'enjoint donc à procéder à son union dans le mois qui suit la notification de la peine. La date a été fixée au lundi 22 juin.
L'article de Sud-Ouest précise cependant:
Mademoiselle E., mère de quatre enfants, peut donc épouser l'homme qu'elle avait rencontré en 2008 et avec lequel elle vivait à Rauzan. Il reste un problème à résoudre : comment faire revenir M.C. d'Algérie d'ici le 22 juin ? Pourra-t-il obtenir un visa des services du Consulat à Alger ? Rien n'est moins sûr.
Monsieur César ne fera sans doute rien pour aider ce retour.
Il est même possible qu'il savoure cela comme une petite vengeance.
Selon un article d'Aqui.fr:
Pour l'heure, Gérard César, n'a pas décidé de faire appel de cette décision de justice. Il a donc programmé le mariage au 22 juin. Ceci étant, il se dit "scandalisé que la justice l'oblige à marier une personne en situation irrégulière". C'est résigné, qu'il appliquera cette décision de justice. Il a demandé à ses adjoints de célébrer le mariage et sera absent lors de la cérémonie.
Cela tombe bien, je ne crois pas qu'il sera invité aux réjouissances.
Si ce jour-là arrive, on lui rendra sa liberté, et il pourra aller se faire voir où il voudra dans sa belle tenue de "parlementaire".
7 commentaires:
Pour peu que l'époux arrive à revenir, c'est une chouette histoire. Voir un sénateur ump mordre la poussière est déjà plutôt sympathique. Mais le voir obligé de procéder (lui ou un de ses adjoints, c'est kif-kif bourricot) ce mariage même qu'il refusait, c'est la grande classe. :-)
Et n'oublions pas qu'il doit verser 200 zeuros de provision à la plaignante.
Mais les visas sont longs à obtenir, et je ne sais pas si l'affaire mobilise beaucoup de monde...
AU SECOURS !
Et quelle est la durée légale de concubinage avant de penser à se marier selon ce même M. César ? Mais ce serait trop d'honneur que de lui adresser la parole.
Je crois que l'éviscération est la punition la plus adaptée ici.
Le point délicat, vois-tu, est de déterminer s'il y a consommation de l'acte. On devrait dresser une brigade de chiens renifleurs de draps...
Décidément, monsieur Guy, ton blougui se spécialise, s'pas ?
Comme disent les copains : "On continue !"
Face à des gens comme ce sénateur maire, on ne peut qu'avoir grande envie de continuer, non ?
METS-EN !!! disent les cousins du Québec…
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