Au parti socialiste, on doit parfois beaucoup regretter le départ fracassant de monsieur Eric Besson, car, malgré son côté "sinistre qui ne rigole que lorsqu'il se brûle", ce triste sire possède une créativité hors du commun qui, alliée à la coutumière mauvaise foi des politiques, peut avoir de miraculeux résultats.
Ne voilà-t-il pas que monsieur Besson vient d'inventer, et de lancer médiatiquement, le très beau et très élégant "concept" de répétition générale d'une opération de police programmée. Il l'a fait avec un tel sérieux, et un tel talent, que cette annonce n'a pas déclenché la pluie de lazzis qu'elle aurait dû recevoir d'un peuple comme le nôtre qui possède un certain sens du ridicule.
C'est en marge d'une réunion avec la presse, ce vendredi 17 juillet, que monsieur Besson a présenté cette "stratégie innovante". Il s'agissait surtout pour lui de répondre à des interrogations sur l'imminence du démantèlement des "jungles" de Calais - ce que madame le maire de Calais nomme, avec tant d'élégance morale, le "nettoyage" et la "désinfection". Selon des observateurs présents à Calais, et selon l'Association Salam, cette opération de basse police était prévue pour le lundi 20 ou le mardi 21 juillet. Un communiqué du MRAP, que je n'ai pas vu, allait dans le même sens.
Pas gêné du tout, monsieur Besson répondit:
"J'ai demandé au préfet du Pas-de-Calais de faire sur le plan logistique une espèce de répétition générale près d'un mois avant le démantèlement (...) . Comme il faut des interprètes, des CRS, des associations humanitaires, des cars pour emmener les personnes, cela demande beaucoup de logistique."
Le mot du jour était "logistique"...
Cette "opération de grande envergure à blanc (...) va se faire dans la transparence", a assuré Eric Besson. "Il y aura mobilisation de tous les moyens pour vérifier que nous sommes capables de le faire dignement". "Fermer la jungle, c'est facile. La fermer dignement, c'est plus complexe", a conclu le ministre de l'Immigration.
Le second mot du jour était "dignement"...
Malgré ce mot, qui est toujours un peu choquant dans la bouche de monsieur Besson, les journalistes présents ont sans doute cru à cette invraisemblable histoire de répétition générale.
Ce vendredi, pour monsieur Besson, était surtout le jour de la rencontre avec les 24 associations d'aide et de soutien aux migrants qui avaient accepté son invitation.
Libération, qui est très fier d'avoir participé à l'amplification de ce débat, annonce:
La brûlante question du «délit de solidarité» était à l'ordre du jour.
Selon Delphine Legouté, qui signe l'article, monsieur Eric Besson aurait fait trois propositions:
(...) il a ainsi promis aux associations présentes de «compléter l'article 622-4 afin de protéger les actes humanitaires». Concrètement, les «travailleurs sociaux et médico-sociaux» devraient être exemptés de poursuite en cas d'aide aux sans-papiers dans le cadre de leur mission.
Le ministre de l'Immigration a également annoncé qu'il souhaitait «préparer une circulaire qui encadrera les conditions d'intervention des forces de l'ordre». Certains lieux, comme les écoles et les préfectures, sont en effet censés être exclus des contrôles de police et de gendarmerie. Cette circulaire devrait préciser et allonger la liste. Enfin, un «guide des bonnes pratiques» censé marquer la frontière entre aide humanitaire et aide à la filière clandestine devrait être élaboré et distribué aux bénévoles.
"Du côté des associations, le bilan est globalement positif.", nous dit-on...
Et, moi qui ne suis ni travailleur social, ni travailleur médico-social, ni même bénévole d'une association, je regrette cette appréciation molle des propositions du ministre.
Je me retrouve davantage dans la position du Gisti, rappelée par Delphine Legouté:
Toujours très virulent dans sa lutte contre le «délit de solidarité», le Gisti a préféré décliner l'invitation du ministre. «Nous voulons l'abrogation pure et simple de l'article 622-1 et non une simple modification, a-t-il déclaré. De plus la circulaire ne nous intéresse pas car elle n'a pas valeur de loi».
J'aime mieux être virulent avec le Gisti, que d'accorder la moindre confiance à monsieur Besson.
Si ça se trouve, cette réunion n'était qu'une répétition générale, pour de rire...
2 commentaires:
Oui, rions.
L'«opération de grande envergure» sera chauffée «à blanc» (comme les pré-épreuves du bac ? de la B.A.C. d'État ? ) par «la brûlante question du "délit de solidarité"».
«"La fermer dignement [ma gueule], c'est plus complexe", a conclu» É.Rictus Besson.
Delphine Legouté, c'est un nom si beau qu'on le prononcerait à l'infini sous les étoiles, en souhaitant la crème du meilleur à celle qui le porte (chez Joffrin, c'est pas gagné). Peut-on tomber amoureux d'un nom ? (Oui, je sais, ça sent son XVIIe siècle, mais c'est de mon âge.)
Pourquoi ne pas profiter de la très institutionnalisée "nuit des étoiles", qui ne devrait pas tarder ? (normalement c'est après le tour de France...)
Et bien sûr, on peut. D'un nom, d'un prénom, d'un surnom...
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