Avec beaucoup d'humanité, monsieur Brice Hortefeux a su renouer les fils du dialogue social avec les compagnies de CRS qui menaçaient de prolonger inconsidérément des grèves de la faim à peine commencées. Il y avait urgence : les carapaces dont s'affublent ces indispensables auxiliaires de sécurité ne sont pas, comme on sait, en matériaux très rétractiles, et il aurait été fort coûteux de renouveler l'équipement de nos remparts républicains affectés de cette inévitable fonte lipo-musculaire qui suit les jeûnes prolongés.
C'est donc avec l'esprit libre, tout à la satisfaction du devoir accompli, que le ministre de la police et des expulsions a pu se présenter, ce mercredi, devant les sénateurs pour "faire le point sur son action depuis 2008" et défendre le projet de durcissement du "dispositif" de lutte contre "l'immigration clandestine" initié par son "collègue", monsieur Éric Besson.
Vous trouverez une partie de ses notes de travail dans l'article de Jean-Marc Leclerc, dans le Figaro, accompagné d'une "infographie" à l'usage des amateurs de ces chiffres qui sont présumés faire une politique.
Cette nouvelle loi est, on le sait, présentée comme "la transcription en droit français de décisions prises (...) au niveau [européen]", en 2008, sous l'impulsion de monsieur Hortefeux, alors ministre de notre identité menacée. Ce "pacte européen sur l'immigration et l'asile" n'était lui-même que la "transcription" en technolangue communautaire de toutes des xénophobies du vieux continent.
Pour bien montrer aux sénateurs quels dangers menacent l'Europe aux trop anciens parapets, on pourrait suggérer à notre ministre des fortifications réelles ou virtuelles de faire état de ces trois envahisseurs mongols qui sont parvenus jusqu'à Rennes, malgré la très grande vigilance communautaire.
Ils ont respectivement 13 ans, 2 ans et un mois. Leur mère est morte d'épuisement le 4 janvier, à 34 ans, et leur père est en rétention aux Pays-Bas.
Et, bien sûr, ça fait peur...
Un grand frisson d'indignation devrait parcourir les rangs de la haute assemblée, si soucieuse des deniers publics, en apprenant que le petit dernier, né prématurément à la mort de sa mère, est encore hospitalisé à Rennes, aux frais du contribuable...
Un petit malin, assurément.
L'histoire de ces trois redoutables envahisseurs, de leur mère et de leur père, on peut la lire sur le site du RESF, dans un communiqué daté du 27 janvier :
Amarjargal GANAA et Alta MING, un couple de Mongols, demandent l’asile aux Pays-Bas en 2007. Déboutés, ils rejoignent la trop longue cohorte des réfugiés sans papiers. Leur fils Ulaaka (né en 1997) les rejoint. En juillet 2008, nait à Rotterdam un second enfant, Amarbayasqalan. Alta Ming est arrêtée le 25 juin 2010 et placée en centre fermé aux Pays-Bas. Le 28 octobre, le père, Amarjargal GANAA est également arrêté. Enceinte et malade, Alta est libérée le 20 novembre 2010. Les autorités néerlandaises lui donnent 48 heures pour quitter le pays. Amarjargal GANAA est maintenu en rétention pendant que sa femme et ses enfants sont chassés. Ils se réfugient en France, à Rennes, où vit une petite communauté mongole.
Hébergés tant bien que mal par leurs compatriotes, dormant parfois dans la rue, Alta et ses enfants sont brinqueballés d’hébergements d’urgence en hôtels miteux. Elle s’épuise. Le 4 janvier, elle décède à l’hôpital de Rennes, à l’âge de 34 ans. L’enfant qu’elle porte peut être sauvé. Prématuré, il est encore hospitalisé. Les deux aînés sont recueillis provisoirement par une famille mongole sous le contrôle de l’ASE. Le plus grand est scolarisé au Collège des Hautes Ourmes à Rennes.
Leur père, Amarjargal GANAA, a été présenté le 18 janvier à un juge néerlandais qui a décidé la prolongation de sa rétention. Il exige un document attestant la paternité pour le libérer !
Hier, un article de Libération nous apprenait qu'Amarjargal Ganaa avait pu téléphoner, depuis son centre de rétention, à la famille d’accueil de ses enfants et avait annoncé que le ministère de l’Intérieur néerlandais acceptait qu'il se rende en France à condition que son homologue en soit d'accord...
Cette information a été confirmée par un article du Mensuel de Rennes, et par un nouveau communiqué du RESF :
Le ministère de la justice néerlandais vient d’informer l’avocat de M. GANAA que les autorités françaises avaient donné leur accord pour le transfert en France de ce père de famille mongol de trois enfants, lundi prochain 7 février. Cette information a été confirmée par l’ambassade des Pays-Bas.
RESF et tous les soutiens de la famille Ganaa se réjouissent de cette première victoire qui démontre une nouvelle fois que, seules, la solidarité et la mobilisation peuvent avoir raison de l’inhumanité des décisions prises par l’application de politiques européennes de l’immigration qui oublient que, derrière les chiffres et les dossiers, ce sont des vies humaines, des familles que l’on broie.
Toutefois, cette avancée ne saurait être considérée comme une victoire complète, car le transfert sur le territoire d’Amarjargal Ganaa ne nous donne aucune garantie quant à sa libération et à l’obtention d’un titre de séjour. Les autorités néerlandaises le remettront lundi aux autorités françaises qui, seules, décideront de son statut sur le sol français et, donc, de celui de ses enfants, dont le plus jeune, 1 mois, est toujours hospitalisé.
On comprend bien que nos autorités peuvent encore estimer que cette famille d'envahisseurs mongols a "vocation à" être placée en centre de rétention avant son expulsion vers la Mongolie.
En quelques jours, on doit bien pouvoir équiper le CRA de Saint-Jacques de tout ce qu'il faut pour accueillir un prématuré dans sa bulle...
3 commentaires:
Que tout cela fait froid dans le dos...
Je confirme que le ministère n'a donné aucun engagement quant à a délivrance d'un titre de séjour à ce père de famille mongol, qui arrivera à Roissy CDG lundi matin prochain.
Nathalie Fessol - RESF
@ Dorémi,
Et la lecture de certains commentaires dans la presse ne réchauffe pas le cœur...
@ Nathalie,
Merci de cette confirmation.
Et on continue !
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