Les policiers toulousains qui ont été envoyés à Calais pour prêter leurs mains fortes à la fermeture de la "jungle" ont été déçus du voyage.
Il faut dire que, pour un authentique toulousain, dépasser Saint-Jory, c'est déjà cafardeux, et même, d'un certain point de vue, humiliant. Alors, vous pensez bien que "monter" jusqu'à Calais, ça représente la fin de tout.
Imaginez le pauvre policier toulousain de retour dans son quartier croisant son voisin:
- Adieu, Manu, t'es rentré, boudu...
- Eh ouais...
- Et c'était bien là-haut, dans le Nord ?
- C'est pas le Nord, c'est le Pas-de-Calais.
Et l'autre qui connait ses classiques:
- Et s'il y a pas de Calais, pourquoi t'y es allé ?
Mais ce qui démoralise surtout le toulousain en voyage nordique, c'est la fadeur de la nourriture que l'on est obligé de supporter dans ces ternes contrées. Le cassoulet, voyez-vous, il n'a plus de goût du tout, et même plus de goût à rien...
Et quand on apprend que nos amis de la DDPAF 31 n'ont eu que de "simples casse-croûtes" à mâchonner, on comprend qu'ils ne mâchent pas leurs mots dans ce tract rédigé par le bureau local DDPAF 31 du syndicat Alliance, et daté du 23 septembre.
Ce tract, reproduit par IndymédiaLille et accessible en ligne, mérite une citation complète, tant la grâce de l'expression, en caractères gras comme il se doit, le dispute à l'élévation des sentiments:
Pour ALLIANCE POLICE NATIONALE, les conditions d’emploi des Fonctionnaires de la DDPAF 31 en mission à CALAIS (Fermeture de la fameuse Jungle) sont absolument I.N.A.C.C.E.P.T.A.B.L.E.S. C’est pourquoi le Bureau Zonal MIDI-PYRENEES s’est empressé de faire part à MonsieurPAJAUD, Directeur Zonal PAF Sud Ouest, de sa plus profonde indignation.
35 heures de service en 2 jours (trajets compris), de simples casse-croûtes pour se sustenter, aucun petit déjeuner ce matin et un voyage retour en compagnie de «retenus», dont certains présentaient des maladies contagieuses, c’est bien là la fin de tout !
Selon notre interlocuteur (Monsieur PAJAUD), le personnel concerné bénéficierait des frais de mission, de toutes les heures supplémentaires effectuées et d’une prise de service le lendemain à 13h00. Le Bureau National ALLIANCE POLICE NATIONALE est intervenu auprès de la Direction Centrale de la PAF et ce, afin que les Fonctionnaires employés sur cette lamentable mission soient placés en repos toute la journée de demain.
Cela dit, ALLIANCE POLICE NATIONALE sollicite en sus pour ceux-ci, l’attribution d’une prime événementielle à hauteur du travail fourni et surtout des contraintes subies...
N'ironisons pas sur l'indignation soulevée par les conditions du retour vers Blagnac, en compagnie de "«retenus», dont certains présentaient des maladies contagieuses", on a beaucoup exagéré la solidité du système immunitaire des forces de police... Il paraît même que leur quasi immunité juridique est fort surestimée...
Notons que si, en l'occurrence, on dénonce "la fin de tout", il y a peut-être là une amplification rhétorique, tempérée par le fait que l'on n'en profite pas pour revendiquer une dose supplémentaire de Tamiflu.
L'essentiel du mécontentement, face à cette mission qualifiée de "lamentable", se cristallise sur les graves problèmes de restauration rencontrés par les personnels dans leur travail.
Un autre tract, également daté du 23 septembre, et qui se trouve, lui, sur le site national du syndicat, demandait "que tous les collègues déplacés bénéficient de compensations conséquentes à la hauteur du manque de considération dont ils ont été victimes", et suggérait, parmi ces compensations, une "reconnaissance écrite de l’administration pour le professionnalisme de nos collègues dans des conditions de travail déplorables (aucun repos, aucun repas chaud, absence de petit déjeuner etc…) "
Le manque de "repas chaud" et de "petit déjeuner" est bien difficile à digérer.
Il faut reconnaître que petit déjeuner et repas chaud sont deux mamelles de notre culture (nous en avons d'autres, notre culture nationale ne manque pas de mamelles) et ne constitue pas une exception toulousaine... Et il est par ailleurs probable que nos braves policiers aient ressenti quelque dépit face à des migrants à qui les bénévoles des associations avaient pris l'habitude de servir des repas chauds, et qui, dans leur «jungle», pouvaient s'offrir de vrais petits déjeuners au barbecue.
Il permet de chauffer l’eau (pour le thé, la lessive ou la toilette),
mais également d’y faire brûler des barres en fer
avec lesquelles les migrants se mutilent le bout des doigts
pour effacer leurs empreintes digitales (sur la photo). *
Calais, déversoir des exodes oubliés - ou la vie réinventée,
sur Contre-Faits.)
Face à ces policiers qui s'insurgent (syndicalement...) d'avoir été nourris de sandouiches, je ne peux que penser aux migrants de Calais qui ont décidé de laisser tomber petits déjeuners, en-cas et repas chauds pour entamer une grève de la faim, qu'il faut aussi voir comme une grève du désespoir.
Voici leur communiqué:
EMBARGO 12H, MERCREDI 30 SEPTEMBRE 2009
Depuis 12 heures ce matin, un groupe de migrants présents à Calais ont débuté une grève de la faim très visible dans un endroit public. Les migrants, provenant de régions incluant l'Iran, l'Afghanistan, le Soudan, La Palestine et l'Égypte disent qu'ils continueront la grève jusqu'à ce que les pays occidentaux coopèrent pour leur offrir l'asile. Ils demandent aussi qu'aucun migrant ne soit réadmis vers la Grèce, l'Italie ou Malte.
Les migrants sont confrontés à un harcèlement constant de la part de la police. Tous les jours certains d'entre eux sont arrêtés, emmenés au commissariat de police, pour être ensuite relâchés quatre ou six heures après. Occasionnellement, ils sont retenus pour deux ou trois jours. La répression s'est intensifiée récemment avec la destruction de la jungle où de nombreux migrants vivaient, l'usage inconsidéré de gaz lacrymogène y compris sur des femmes enceintes,la destruction des affaires personnelles et le ciblage de migrants faisant le jeune pendant le Ramadan en les arrêtant à la tombée de la nuit et en jetant leur nourriture. Si la police essaie de séparer les grévistes de la faim ou de les arrêter pour des motifs stupides, il disent qu'ils continueront la grève de la faim pendant leur détention et reviendront ensuite dans un espace public pour continuer leur action lorsqu'ils seront libérés.
Les activistes de No Borders soutiennent déjà les grévistes de la faim en étant à leur côté, mais les migrants appellent à un support partout dans le monde. Les messages de soutien peuvent être envoyés sur http://calaishungerstrike.wordpress.com et les grévistes accueillent quiconque voudrait rejoindre la grève de la faim, aussi bien à Calais qu'ailleurs.
Benjamin, un demandeur d'asile iranien de 38 ans, dit : « La police dit que nous ne pouvons pas être là, mais nous n'avons aucun endroit où aller. Le monde nous ignore alors nous rendons notre souffrance publique en entrant dans une grève de la faim à la vue de tous. Les touristes se déplaçant sur le port et jouissant de leur liberté de circulation seront forcés de voir notre manque de liberté jusqu'à ce que les pays occidentaux travaillent ensemble pour nous offrir un endroit où bâtir une nouvelle vie en sécurité »
Avec des migrants subissant une répression croissante et l'hiver approchant, la situation est urgente. Mais ils disent que les pays occidentaux ne doivent pas fuir leur responsabilité en réadmettant les migrants dans le premier pays où leurs empreintes digitales ont été prises. De nombreux migrants réadmis en Italie, Grèce ou Malte disent que la situation est pire que vivre en clandestinité à Calais et qu'ils y sont opprimés. En Grèce, les migrants réadmis sont souvent enfermés pour trois mois et de plus en plus souvent pour six mois. Relâchés, les migrants n'ont toujours aucun endroit où aller et continuent à être la cible de la police qui les bat et parfois déchirent leurs papiers. La réadmission n'est pas la solution selon les grévistes de la faim. Des pays tels que le Royaume Uni, le Canada les USA ou la Suède devraient prendre une part de l'accueil des migrants.
* Voir à ce sujet l'article de Jean-Marc Manach (Le Monde Diplomatique).
Ajout du 2 octobre, ce message reçu ce matin:
JEUDI 1er OCTOBRE, 22H
Le démarrage d'une grève de la faim à Calais a été annoncé mercredi 30 septembre. L'objectif était de réclamer une coopération entre Etat européens pour qu'ils obtiennent de réelles possibilités de demander l'asile. Les grévistes, regroupés dans le Parc Saint Pierre en centre ville de Calais, en ont été très rapidement évacués par les forces de police. Trois d'entre eux ont été arrêtés.
Face à cette répression et à la difficulté d'organiser un tel mouvement, ses participants ont décidé de suspendre leur grève de la faim. Malgré cela, de nombreux migrants sont décidés à s'organiser pour obtenir une reconnaissance de leurs droits non seulement dans les textes mais aussi dans les faits.
Le combat continue pour la liberté de circulation et d'installation !
No border - Calais
4 commentaires:
Putain con,encore un parigot!
Cher Monsieur GUY M à TOULOUSE la virgule con est remplacée par con.
C'est boudu-con qu'il faut dire. Le nord con c'est à partir de MONTAUBAN.
Le cassoulet avec des fayots Tarbais un régal.
Allez con bonne soirée.
Entre nous,je n'emploie jamais con,la tradition se perd.Mais il parait que j'ai un accent,pourtant je pense que c'est les autres qui ont un accent.
Je crois que j'ai gaffé...
Cependant, quand on est à Saint-Jory, faut avouer qu'on est presque à Montauban.
Pour le Tarbais, je suis d'accord. Chez nous, il coûte la peau des fesses (avec le label rouge), mais sa peau est si fine...
Je vais corriger le "boudi" en "boudu".
Et bonne soirée.
Le policier toulousain sous alimenté est plus délicat que tout policier d'origine inconnue et bien alimenté .
Sans oublier que s'il a les crocs, il risque de les montrer.
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