mercredi 13 octobre 2010

Une vie sans importance

Hier, au lieu de rejoindre la grève et les cortèges, nos élus ont continué leur sale boulot législatif:

Les députés ont adopté le projet de loi sur l'immigration, mardi 12 octobre, par 294 voix contre 239. Le groupe UMP a globalement voté pour, à l'exception de douze de ses membres, dont le député des Yvelines Etienne Pinte. Le groupe du Nouveau centre (NC) s'est divisé entre votes pour et abstentions. Les groupes de gauche, qui ont mené bataille contre ce projet, ont voté contre.

Monsieur Éric Besson peut être content de lui, et de ceux qui ont soutenu, amendé et durci son projet. Au nom de la loi, et un peu plus aisément, on pourra continuer à broyer des vies sans importance.

Des femmes, des hommes, des enfants, moins importants que du bétail.

Quelle importance peut bien avoir la vie de Skiffter, cet enfant de 6 ou 7 ans séparé de sa mère a été expulsée mercredi dernier vers le Kosovo ?

Aucune, puisque ses parents sont des "clandestins".

D'ailleurs son histoire est si peu intéressante que les médias ne l'ont pas relayée. Je n'ai pu la découvrir que grâce à la vigilance de Napakatbra (Les mots ont un sens) qui signalait, dans sa revue de presse/web de lundi, un article de Lyon Capitale. Restait à consulter la page du RESF 69, pour essayer d'y voir un peu plus clair. LibéLyon n'a pas été informé, ou n'a pas cherché à l'être...

Les parents de Skiffter sont des Albanais du Kosovo, pays qu'ils ont quitté parce qu'ils y risquaient leurs vies. Leur fils est né en Allemagne, peu de temps avant leur arrivée en France en 2003. Il est maintenant scolarisé à l'école Michelet, dans le 2e arrondissement de Lyon. Il ne faut pas cacher qu'il a des difficultés, mais il faut aussi souligner qu'il va à l’école régulièrement et qu'il est suivi en orthophonie.

Le père et la mère ont tous deux besoin de soins médicaux. Monsieur Berisha, notamment, est atteint d'une maladie qui nécessite un traitement lourd et inaccessible au Kosovo. Malgré cela, toutes les demandes de titres de séjour pour raison de santé ont été refusées.

En septembre, Nusrete Berisha a été arrêtée avec son fils, et ils ont passé 48 heures au Centre de rétention de Lyon. Un juge des Libertés, empêcheur d'enfermer en carré, a ordonné leur libération, mais la préfecture a fait appel de cette décision. Cet appel devait être examiné le 7 octobre. Le 22 septembre, la police est venue arrêter Nusrete à son domicile pour la reconduire au CRA, mais, cette fois, sans son fils. Et comme si la préfecture avait voulu prendre de vitesse la cour d'appel administrative, madame Berisha a été expulsée le 6 octobre...

Selon le compte-rendu de RESF:

L’expulsion a eu lieu malgré les conclusions du rapporteur de la République - que l'avocate a pu consulter dès mercredi après l'expulsion et qui sont favorables à Madame Berisha puisqu'elles estiment que la préfecture "a fait une erreur substantielle en rendant une ordonnance illégale et qu'en conséquence, il devait y avoir injonction faite de délivrer des cartes de séjours au couple Berisha".

Le 7 octobre, "Skiffter et son père étaient présents à l'audience, sous la protection de parents d'élèves et de plusieurs personnes de RESF. Le rapporteur de la République a demandé l'annulation des procédures prises à l'encontre des deux parents, l'attribution d'une autorisation provisoire de séjour, et le réexamen du dossier sous deux mois".

(Il faut maintenant attendre la décision du tribunal.)

Parmi les parents d'élèves, était peut-être présente Véronique qui a tenté d'alerter les "journalistes lyonnais" en leur envoyant un mail, et qui a fini par susciter l'article de Lyon Capitale - où l'on peut constater, à lire les commentaires, que le troll lyonnais a le cerveau aussi consistant que la quenelle locale.

Elle y pose cette question:

Que répondre à un enfant qui cherche le soir des montagnes pour cacher son copain ?

A vrai dire, je ne sais pas...

Mais je me vois mal dire à cet enfant que tout cela n'a vraiment aucune importance.

2 commentaires:

Marianne a dit…

La France se couvre de honte et j'en fais partie hélas !

Guy M. a dit…

Heureusement, la fierté nationale n'est pas encore obligatoire.