Hier soir, la Réblouguique des Ploucs de Trifouillis-en-Normandie m'a fait l'honneur d'organiser une réunion exceptionnelle, dans l'arrière-salle de chez Pierrot, afin de fêter dignement mon retour régulier sur la toile.
Dans l'avant-salle, nous avons pu croiser le localier du canton, que tout le monde appelle Édoui, rapport à son dévouement à la cause du journalisme d'investigation. Mais il n'a pu être admis à notre petite sauterie puisque, par décision unanime, notre groupe est interdit aux titulaires d'une carte de presse, et autres chasseurs de scoupes.
Certes, la chasse au scoupe n'est pas une activité déshonorante, et elle est même tout à fait exaltante. Souvenez-vous:
Ils le chassèrentxxavec des dés à coudre
ils le chassèrentxxavec passion
Ils le poursuivirentxxavec des fourchettesxxet de l'espoir
Ils menacèrentxxsa vie
avec une actionxxde chemin de fer
Ils le charmèrentxxavec des souriresxxet du savon. (1)
ils le chassèrentxxavec passion
Ils le poursuivirentxxavec des fourchettesxxet de l'espoir
Ils menacèrentxxsa vie
avec une actionxxde chemin de fer
Ils le charmèrentxxavec des souriresxxet du savon. (1)
Mais à Trifouillis, nous ne mélangeons pas les serviettes des vrais amateurs avec les torchons des professionnels.
Tout en terminant son dé à coudre de Sauvignon, Édoui eut tout de même le temps de m'assurer que le bruit selon lequel monsieur Éric W. serait intervenu pour faire attribuer la médaille d'honneur du Travail-Bien-Torché à messieurs Bernard T. et François C. était tout à fait fantaisiste, et que, malgré tous ses efforts, il n'avait pu en avoir confirmation.
Car ce scoupexxétait un faiquexxvoyez-vous. (2)
Nos deux sympathiques récipiendaires
surpris dans la salle d'attente des luttes sociales.
(Photo de Jean-Baptiste Quentin / MAXPPP.)
surpris dans la salle d'attente des luttes sociales.
(Photo de Jean-Baptiste Quentin / MAXPPP.)
Pourtant nos deux dirigeants syndicaux mériteraient bien qu'on les décore un jour pour leur très grande sagesse dans le dosage de la revendication. Sans parler de l'humour à froid qu'ils savent manier avec tant d'élégance, sans jamais, non vraiment, tomber dans le ridicule.
Prenons monsieur Bernard Thibault, de la CGT. Il vient de décider, avec une partie de ses collègues des directions syndicales, d'appeler à une nouvelle grrrrrandissime journée d'action le 23 septembre, soit une semaine après la date prévue pour le vote de cette "réforme des retraites". En veillant bien à ne jamais prononcer le mot (obscène) de "retrait", ni bien sûr l'expression (trop datée) de "grève générale", il lance un avertissement:
"On peut aller vers un blocage, vers une crise sociale d'ampleur. C'est possible."
On se doute bien que, tant à l'Élysée qu'à Matignon, cette menace d'escalade revendicative en terrain plat est prise avec le plus grand sérieux: on est littéralement mort de trouille.
Bourvil et Louis de Funès,
dans Le Corniaud, film de Gérard Oury, 1965.
(Toutes ressemblances et allusions pourraient bien être volontaires.)
dans Le Corniaud, film de Gérard Oury, 1965.
(Toutes ressemblances et allusions pourraient bien être volontaires.)
Nos attentistes syndiqués espèrent peut-être pouvoir peser sur le vote de cette loi lors de son examen au Sénat...
Ils sont décidément bien mignons.
Et peut-être également peu attentifs.
Peut-on leur conseiller de regarder d'un peu plus près ce qui se passe, actuellement, dans la discussion de Loppsi II, où les sénateurs, après un mouvement d'humeur, se sont ré-alignés en bon ordre sur les positions du gouvernement.
Cette loi, dont le nom complet, Loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, est déjà tout un programme, marque un pas essentiel dans la véritable escalade entreprise par le pouvoir sarkoziste vers les sommets sécuritaires.
Le cas de l'amendement 404, déposé au tout début du mois, "avec 25 autres dans la foulée des annonces sécuritaires émises par Nicolas Sarkozy à Grenoble", est un bon exemple des méthodes utilisées pour assurer cette progression. Le DAL a découvert l'existence de ce "404", qui, complétant l'article 32ter A, mettrait dans les mains des préfets une véritable machine à expulser de manière expéditive, sans souci des procédures déjà prévues par la législation, et éventuellement contre la volonté du propriétaire, toute occupation illicite "présentant de graves risques pour la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publique".
Hier soir, un rassemblement de protestation s'est tenu devant le Sénat. On pourra en trouver un compte-rendu dans un article des Inrocks. Les résultats de cette démarche sont incertains, mais on peut vérifier, en allant chercher, sur le site du Sénat, l'aperçu de l'amendement, que
Cet amendement a été retiré avant séance.
Reste à savoir ce que devient l'article 32ter A...
(1) Ce qui veut dire:
They sought with thimbles, they sought it with care;
They pursued it with forks and hope;
They threatened its life with a railway-share;
They charmed it with smiles and soap.
The hunting of the Snark, An Agony in eight fits, de Lewis Carroll, cité dans la traduction de Jacques Roubaud (rééditée en folio-Gallimard, 2010).
(2) Soit encore:
For the Scoop was a Fake, you see.
Ce qui n'est qu'une immonde contre-façon à ma façon de l'œuvre déjà citée et de sa traduction...
4 commentaires:
Pour le cas où on aurait l'idée saugrenue de se réjouir du retrait de cet amendement, le cabinet d'Hortefeux prend soin de nous calmer (Le Monde) :
"[...] l'amendement prévoyant l'évacuation d'office pour les bâtiments, qui a suscité une manifestation de Droit au logement et de la Fondation Abbé-Pierre devant le Sénat, a été retiré. "C'est uniquement pour des raisons techniques, il sera représenté à l'Assemblée nationale", a-t-on indiqué au cabinet de M. Hortefeux."
Bises quand même et bon week-end.
Ces "raisons techniques" éclairent sur les techniques d'enfumage utilisées pour faire passer les fourberies...
Au moins le DAL, aura-t-il attiré notre attention sur cet amendement anti-pauvres.
Bises et bon ouiquende.
d'association d'idée en association d'idée:
l'amendement 404 -> "404 file not found" -> quand même, ici ou ailleurs, on se dit qu'on serait peut-être mieux sans gouvernement du tout.
il fut un temps où le "gouvernment is the problem" pour le cow-boy potus, naouvadèyse il l'est surtout pour les étages inférieurs de la pire à mide.
J'avais pensé que le site du sénat renverrait le fameux "404 file not found"... mais non, leurs ouaib-maîtres sont très sérieux et ont prévu les reports techniques.
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