Tenir ce blogue m'aura mené à bien des compromissions: je viens par exemple de consulter le site "Les coulisses de la Télévision", pour vérifier que la télé qui grignote les neurones, TF1, avait bien programmé, demain, dans son émission de reportages "Sept à huit" un sujet sur les présumés sabotages des lignes SNCF.
J'y lis, anéfé:
Les ultras de Tarnac. Ils s'appelaient eux-mêmes « le comité invisible ». Leurs sabotages présumés marquent en France le retour de l'ultra-gauche violente. Ces neuf jeunes issus de milieux favorisés, ont entre 22 et 34 ans. Ils sont soupçonnés d'avoir commis sur le réseau ferré français les cinq actes de malveillance perpétrés entre le 26 octobre et le 8 novembre. Des fers à béton avaient été posés sur des caténaires en Moselle, dans l'Oise, l'Yonne, et la Seine-et-Marne. Tous ont été mis en examen. Cinq d'entre eux ont été incarcérés. Pour la première fois, pour « 7 à 8 », l'un des suspects parle. Mathieu reconnaît l'existence du groupe, raconte son fonctionnement, mais nie avoir participé aux sabotages. Pour la première fois aussi, le coordinateur en France de la lutte anti-terroriste s'exprime sur cette affaire. Les suspects étaient surveillés par la police. La plupart vivent en communauté et sont plutôt bien intégrés à Tarnac, un village de Corrèze.
J'avais appris la chose en feuilletant, hier matin à Rouen, le journal Paris-Normandie dans un café de la place du Vieux-Marché, surpris d'y trouver un entretien avec l'un des gardés à vue et inculpés de cette affaire.
Ce journal n'est pas très connu pour ses positions politiques radicales et je m'étonnai. Mais point trop, car si un régional passe sur TF1, le journal régional se doit d'en parler, ce sont des choses qui se font, en région.
Je fus davantage étonné d'y trouver l'annonce de la création d'un comité de soutien rouennais, sous forme d'une "association, baptisée Comité visible", qui devait organiser, ce samedi, un rassemblement devant le palais de justice de Rouen. Des précisions sans doute ultérieurement.
Le palais de justice autrefois,
image transférée du Blog de Rouen.
image transférée du Blog de Rouen.
L'entretien avec Matthieu B. est retranscrit de manière honnête, il me semble, par Paul Mouchel qui écrit dans son introduction:
Après une centaine d'heures de garde à vue vécue la semaine passée dans le cadre de l'enquête sur les sabotages à la SNCF, Mathieu B. est plutôt en forme.
Même s'il confie «avoir perdu cinq kilos», il est le moins marqué des trois Rouennais éprouvés nerveusement et psychologiquement par cette épreuve qui s'est déroulée dans les locaux de la sous-division anti-terroriste à Levallois et Nanterre.
Fragiles depuis leur libération samedi après-midi, notamment victimes de troubles du sommeil, Elsa B. et Bertrand D. ne souhaitent pas s'exprimer publiquement.
Matthieu B. a su garder le contrôle de l'entretien, et j'espère qu'il a réussi de même face aux caméras de TF1 (en ce qui concerne le montage, c'est en général plus difficile, à moins qu'il n'ait imposé ses exigences).
Il donne un certain nombre de détails sur son arrestation et sa garde à vue, par petites touches... Et cela sera instructif pour tout le monde.
Après son arrestation:
Le convoi de véhicules est parti en fin d'après-midi. Transportés à 180 km/h sur l'autoroute, nous avons dû arriver vers 20 h à Paris. Je me suis retrouvé dans une cellule de 5 m² sans fenêtre, avec pour seul mobilier un banc en béton, le tout baigné d'une très faible lumière.
Le déroulement des interrogatoires:
Avez-vous subi des atteintes physiques durant votre garde à vue?
« Non, il s'agissait plutôt d'intimidation du genre :''On sait que tu mens'' ou ''tu ne reverras jamais ton fils''. A partir du jeudi, les policiers ont cessé de m'interroger sur les faits et m'ont questionné sur mes lectures, les gens croisés dans ma vie, les manifestations auxquelles j'ai participé. Ils m'ont sorti ma lampe frontale, l'adresse de mon ancien proprio... le moindre objet insignifiant était sujet à interprétation.»
Avez-vous eu peur?
« Le troisième jour a été très difficile. Je savais qu'ils n'avaient rien contre moi mais les idées s'embrouillaient dans ma tête sous l'effet de la fatigue, du manque de nourriture. La situation était si surréaliste que j'avais l'impression d'être dans les Bronzés à Guantanamo.»
C'est une manière élégante de présenter les choses, non ? Et qui ne masque pas ce qu'elles ont de légèrement, oh! très légèrement inhabituel...
Sa libération:
Je suis passé le dernier devant le juge d'instruction (NDLR, au palais de justice de Paris, sur l'île de la Cité). Cela a duré cinq minutes. L'avocat commis d'office m'avait prévenu un peu avant que mon dossier était vide. Un peu embarrassé, le juge m'a signifié mon placement sous contrôle judiciaire et ma mise en examen. Une fois dehors, j'ai retrouvé les autres qui venaient d'être libérés et des amis venus nous accueillir.
On devra aussi à Matthieu B. quelques images à conserver dans nos têtes.
Celle des policiers vidant, avec le soin qu'on imagine aisément, les pots de confiture que lui avait donnés sa mère. Cette image a déjà été reprise par l'article du Monde que j'ai signalé hier.
Une autre image mérite de rester:
Nous avons été braqués nus par des policiers cagoulés, et menottés.
Car c'est avec cette délicatesse de sentiments que l'on peut traiter une jeune femme et un jeune homme, à condition qu'ils soient de présumés présumables.
6 commentaires:
Présumés présumables et "issus de milieux favorisés"…
L'insistance sur les enfants de bonne famille, ça marche toujours aussi. C'est l'amour médiatique du contraste et du paradoxe.
Bon repos dominical
Je crois tout de même qu'on les aurait préférés en pleine crise d'adolescence attardée...mais on fait avec ce que l'on a. Et on sait y faire.
Alors TF1 réussit à les avoir pour 7A8, mais rue 89, nada?
Y'a comme un truc qui m'échappe...
J'ose espérer que les jeunes gens tels que Matthieu sont assez futés pour tenter de dominer leurs apparitions médiatiques. Ils semblent avoir réfléchi là-dessus.
C'est bien ce que je dis... pourquoi 7A8?
Je ne peux pas te répondre, car je ne sais pas...
Je n'ai pas encore cherché d'échos de l'émission (que je n'ai pas vue).
Pas grave, on est un peu lent quand on a l'esprit de l'escalier...
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