dimanche 10 avril 2011

Petite poussée de nombrilisme

Lors du dernier congrès de la Réblouguique des Ploucs, à Trifouillis-en-Normandie, une table ronde a été consacrée au nombrilisme, grand lieu commun de la psychologie blouguistique. La discussion fut précédée d'un exposé, que je fis, assez bien résumé, ma foi, par son titre :

Le nombrilisme, un narcissisme sans miroir ?

(Notez, je vous prie, le point d'interrogation...)

S'ensuivit un débat fort animé où chacun, tout autant que chaque autre, eut tout le loisir de ne parler que de soi.

Nous nous séparâmes en excellents termes.


L'un des nombrils les plus célèbres de l'histoire de l'art.
(Gustave Courbet, L'Origine du monde, 1866, détail.)

Lorsque me prennent des accès irrépressibles de prurit ombilical, je fais comme tout le monde dans le blogomonde, je visite au plus vite mes "statistiques".

Généralement en baisse.

Ce qui calme mes démangeaisons, mais provoque quelques gerçures.

Au cours d'une investigation de ce genre, j'ai pu constater un assez considérable accroissement de la fréquentation de ma page, très précisément à la date du dimanche 27 mars. Un instant, je crus que la gloire, en sa variété blogosphérique, était venue sonner à ma porte.

Las ! Effet d'un engouement passager, généré, à y regarder d'un peu plus près, par un célèbre moteur de recherche, les visites se concentraient sur un ancien billet, daté du 19 juillet 2009, et intitulé Jour de repos au sommet. Les aventuriers de la toile échouaient là après avoir émis, auprès du célèbre moteur, une requête "Bernard-Henri Lévy" ou "Arielle Dombasle".

(Précisons que ledit billet n'était même pas illustré par une vue panoramique du nombril de l'une ou de l'autre...)

Ce tardif succès a pris fin, semble-t-il, il y a deux ou trois jours. Gougueule a dû s'apercevoir que mon petit texte parlait davantage de la réédition plus de la réédition du Discours préliminaire de l'Encyclopédie des Nuisances que de notre emblématique couple glamoureux.

J'espère seulement - mais sans me faire d'illusion non plus - que les utilisateurs, ainsi trompés sur la marchandise, en auront profité pour découvrir le Discours préliminaire et la prose magnifique de Jaime Semprun. On peut souhaiter qu'ils aient pu découvrir, par exemple, le Catastrophisme, administration du désastre et soumission durable, écrit avec René Riesel, et publié en 2008 par les Éditions de l'Encyclopédie des Nuisances que Semprun avait fondées. Ou encore, pourquoi pas, Le sens du vent : Notes sur la nucléarisation de la France au temps des illusions renouvelables, d'Arnaud Michon, publié en 2010 aux mêmes éditions.

In memoriam
Jaime Semprun
(1947-2010)

A la mort de Jaime Semprun, ses amis des Éditions de l'Encyclopédie des Nuisances se sont faits discrets.

Ils ont publié en janvier, sous le titre Andromaque, je pense à vous ! suivi de fragments retrouvés, un bel hommage in memoriam. On peut y lire le texte très personnel que le si peu nombriliste Jaime Semprun avait écrit pour le premier anniversaire de la mort de sa mère, Loleh Bellon*. Il l'avait fait imprimer à cinquante exemplaires hors-commerce en mai 2000.

On peut le découvrir.

Et s'en émerveiller.

"A l'extrémité de ce petit terre-plein que ceignent les eaux et qui semble exposé à en suivre le fil, un saule est planté, dont le verdoiement annonce aux Parisiens la fin de la mauvaise saison, et ce rameau d'olivier réjouit le cœur." Nous ne nous verrons plus sur terre. Entre le quai de l'Horloge et la pointe du Vert-Galant, nous n'aurons fait que quelques pas ensemble, laissant dans la route des phrases un carrefour à chaque mot, mais maintenant le livre est refermé, qui contenait tant de pages, de bonheur détaillé, qu'on ne lira jamais, tout est resserré là, comme un éventail replié dans le décor, figures et paysages, ne sera plus déployé aux yeux de quiconque, tout tient là, et Paris en colimaçon comme la spirale d'une eau qui se vide, et une vie ramassée dans ces quelques mètres du fleuve, en même temps que prolongée d'un surnaturel chemin de pétales serpentant en queue de sirène jusque sous le pont des Arts, dans la gloire d'une aube de printemps.

They lived and loved and laughed and left.




* Actrice et dramaturge, célébrée en poésie par Claude Roy, Loleh Bellon fut, il y a quarante ans, l'une des signataires du manifeste de ces 343 qui ont eu une bien vivante postérité.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Salutations à tous,

Pour commencer , donnez-moi la possibilité de vous démontrer ma gratitude pour chacune des excellentes connaissances que j'ai lues sur cet impressionnant site internet .

Je ne suis pas convaincue d'être au meilleur endroit mais je n'en ai pas trouvé de meilleur.

Je proviens de Cambridge bay, canada . J'ai 37 années et j'éduque deux agréables enfants qui sont tous âgés entre 2 ou 14 ans (1 est adoptée ). J'aime beaucoup les animaux et je tempte de leur offrir les produits qui leur rendent l'existance plus à l'aise .

Je vous remercie à l'avance pour toutes les palpitantes discussions à venir et je vous remercie surtout de votre compassion pour mon français moins que parfait: ma langue de naissance est le mandarin et je fais de mon mieux d'éviter les erreurs mais c'est très complexe !

Bye bye

Arthru

Guy M. a dit…

Merci infiniment...

Ce commentaire est un véritable baume sur mon nombril aussi irrité qu'un BHL* en pleine cris de botulisme.

* il faut toujours le citer, ça attire le chaland.

Olivier a dit…

POur continuer dans la caresse nombrilistique, je me joins à "Anonyme" pour vous dire ma fidélité au site et tout le bien que j'en pense.

Pour continuer dans le thème de l'article, il se pourrait que ce soit un des charmes de Google: se retrouver sur une page inconnue et plaisante juste pour avoir cherché une image ou tout autre chose.
En parlant de ça, je ne me souviens plus comment j'ai découvert la votre.

Marianne a dit…

Je crains fort de "charger " aussi votre nombril étant du même avis que les deux commentateurs précédents aucunement influencée par la référence à BHL .

yelrah a dit…

Je suis nombrilluminé !

Guy M. a dit…

A force, je crains que tout cela ne provoque un œdème des chevilles...