mardi 29 mars 2011

Un parti comme les autres

Afin d'alimenter le débat politique, en état de sous-nutrition très inquiétant, de judicieux politologues, émargeant chez BVA, ont jugé bon de publier les résultats d'un sondage, dit "baromètre de la politique économique", aux lendemains du second tour des élections cantonales.

Le principal résultat de cette "étude de marché et d'opinion" - spécialité de la maison BVA -, réalisée du 23 mars 2011 au 24 mars 2011, en partenariat avec Absoluce, Les Échos et France Info, a été largement repris par la presse :

Le FN, «un parti comme les autres» pour 52% des Français.

La question posée aux sondés, "recrutés par téléphone et interrogés par Internet", était très précisément la suivante :

Vous personnellement, estimez-vous que le Front National devrait être à présent considéré comme un parti comme les autres ?

Et les résultats sont ainsi présentés :


Mais, cherchant des précisions sur la répartition de cette opinion, je n'ai pu trouver, sur un document téléchargé à l'aube, que cet éloquent résumé :


On s'en contentera, en notant que, dans un tel examen de l'opinion, c'est la question elle-même qui serait à questionner, et sérieusement, pour sa pertinence.

Mais, vous le savez bien, le sérieux n'est pas mon fort...

(Cependant, "[moi] personnellement", je trouve que ce "à présent" est une grande trouvaille.)

Même battu, on chante victoire "comme les autres".
(Steeve Briois, candidat à Hénin-Beaumont. Photo Maxppp)

On peut prévoir - mais je n'ai encore rien vu là-dessus - que les instances dirigeantes du Front National sont actuellement au travail, avec leurs avocats, pour envisager de contrer, par un dépôt de plainte, ces insinuations des fabricants d'opinion. Car, au fond, il est plutôt injurieux, pour un frontiste cohérent, d'imaginer que l'on puisse voir dans son parti "un parti comme les autres", dont on pourrait penser tout ce qu'il pense, "[lui] personnellement", des autres partis.

Cette réaction tardera peut-être un peu. Il semble que les conseillers juridiques du Front soient actuellement en surchauffe.

Ils doivent déjà suivre de près les développements de la "polémique" soulevée par Sophia Aram, qui lors de sa chronique du 23 mars sur France Inter, se posait la question de savoir comment faire la distinction entre "gros cons" et électeurs du Front National. Un communiqué du FN laissait entendre que le parti envisageait de saisir le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel.

Il n’en a rien fait pour l’instant, nous a assuré une source interne au conseil. Celui-ci ne s’est pas moins saisi de l’affaire, ému par "plus de 150 mails de protestation, mais aucun courrier du FN"). Moralité: le CSA examinera donc, dès demain, mercredi 30 mars, la chronique en question.

Sophia Aram est assez intelligente pour reconnaître que sa chronique aurait pu être bien meilleure, et bien plus mordante.

N'oublions pas l'adieu qu'elle adressa à Jean-Marie Le Pen, le 12 janvier 2011, au "au nom de tous ceux qui ont eu à souffrir de vos invectives, vos insultes" :


Assez mécontent, paraît-il, monsieur Le Pen n'a même pas pu placer correctement sa pathétique citation cornélienne, mais il n'a pas jugé bon de donner suite.

Les temps changent, et le "parti comme les autres" est devenu très chatouilleux.

Madame Marine Le Pen, fille du précédent, n'a pas apprécié la sortie de monsieur Claude Goasguen, député UMP, qui aurait déclaré, le 22 mars, au cours d'une réunion à huis-clos :

"On ne va pas s'allier avec le FN, c'est un parti de primates. Il est hors de question de discuter avec des primates."

Dénoncé par l'un ou l'une de ses petit(e)s camarades, le pauvre député prétend ne plus savoir s'il a dit "primate" ou "primaire", et assure qu'il a voulu dire "primaire"...

On dit que le FN a "lancé une procédure pour "injure" contre le député de Paris, estimant que l'UMP devait l'exclure".

Dimanche soir, à l'annonce des résultats de son parti "comme les autres", qui fait tout de même un score un peu inférieur aux autres, madame Le Pen a déclaré :

"Les primates se sont grandement mobilisés ce soir."

On a dû l'applaudir.

Monsieur Le Pen, lui, a lancé :

"L'Afrique doit se réjouir ce soir, c'est la victoire des primates."

Je ne sais s'il a été applaudi, mais il semble que personne n'ait demandé son exclusion.

2 commentaires:

Ysabeau a dit…

Ah, ça effectivement la chronique litigieuse n'était pas très inspirée, alors que celle de janvier était excellente et très fine.

Guy M. a dit…

Face à l'humour de la famille Le Pen, elle reste défendable...