En annonçant qu'il allait quitter la matinale de France Inter "du fait qu'[il a] une vie monacale", et sous-entendant par conséquent qu'il allait désormais mener une vie de patachon, Nicolas Demorand, journaliste tonitruant, a donné un bien mauvais exemple à la jeunesse.
Et plonge ma vieillesse dans l'angoisse, car il n'a pas révélé les noms de ceux qui vont le remplacer - il y en aura sûrement plusieurs.
Je n'ai jamais cru un seul instant à la rumeur proclamant que Stéphane Guillon était en tête de liste dans le bureau de monsieur Philippe Val. Les gens qui ont répandu ce bruit ont peut-être vu une liste, mais ce n'était sûrement pas celle des successeurs possibles de notre dynamique et monacal normalien.
Ce qui m'inquiète davantage, c'est cette information, que vient de me donner Ptilu, que l'on appelle aussi le "beurré nantais", car il est originaire de la Loire-Atlantique: selon ses sources, qui sont bien gouleyantes, on envisagerait, en haut lieu, de confier la matinale de France-Inter à un tandem de journalistes formé de Bernard Guetta et Patricia Martin.
Il a dû me dire cela pour me faire peur.
Bernard Guetta est un journaliste extrêmement sérieux.
Plus sérieux que lui, tu meurs !
D'ailleurs, en l'entendant lancer du studio son "bonjour", d'une voix crépusculaire au timbre de bronze, on se demande s'il est vraiment vivant.
On attend alors sa chronique, en se demandant quelle catastrophe géopolitique a bien pu encore arriver à notre pauvre planète.
Car la spécialité de Bernard Guetta, c'est la géopolitique; et la géopolitique, sur France Inter, c'est à 8h 17.
La chronique d'hier matin était intitulée: Les leçons d'un assaut. Titre sobre, mais tout à fait adapté: Bernard Guetta aime tirer des leçons des événements survenus sur la planète, et, à partir de ses analyses, en donner. Des leçons. A la planète tout entière, bien entendu.
C'est un donneur de leçons de type planétaire, en quelque sorte.
Et comme, apparemment, aucun des grands dirigeants auxquels il aimerait s'adresser ne sont à l'écoute de France Inter à 8h 17, il n'a pas fini d'avoir des leçons à donner.
Hier, son incipit a provoqué un certain effet de surprise:
Il y a, d’abord, les évidences, accablantes pour Israël. Organisé dans les eaux internationales, cet arraisonnement était totalement illégal et doit, donc, être considéré comme un acte de piraterie dont les conséquences relèvent de la seule responsabilité de son organisateur. En droit, les passagers de cette flottille étaient fondés à se défendre et, quand bien même auraient-ils initié les violences – ce qui est possible, voire probable, mais reste à prouver – la première de ces violences était l’arraisonnement.
L'auditeur un peu distrait peut penser que, pour une fois à court d'inspiration, son subtil chroniqueur de 8h 17 va lui faire le coup du "point-barre". A peine a-t-il remarqué l'incise, bercée d'un beau rythme ternaire, "ce qui est possible, voire probable, mais reste à prouver", qui laisse planer comme l'ombre d'un doute.
La relance du deuxième paragraphe crée, elle aussi, son effet de surprise:
Cela doit être dit mais, lorsqu’on a dit cela, on n’a dit qu’une partie de la vérité car cette flottille n’avait pas que des objectifs humanitaires.
Il y a des gens qui, lorsqu'ils ne coupent pas le rythme en trois, aiment bien partager la vérité en deux morceaux.
Il est probable, mais je ne m'acharnerai pas à le prouver, que Bernard Guetta estime que l'action humanitaire doit avoir pour objectif de poser des emplâtres sur des jambes de bois, et surtout pas de poser les problèmes en termes politiques ou géopolitiques. Car, selon son analyse, ce que visaient principalement ces fourbes humanitaires "était de placer Israël devant une alternative dont il ne pouvait que sortir perdant". En arrêtant la flottille de la paix, Israël risquait, faisant des victimes, "l'opprobre international", mais en laissant la flottille briser le blocus de Gaza, Israël se résignait à "une victoire politique des islamistes".
(Il fallait bien qu'ils soient évoqués, ceux-là...)
L'État d'Israël, "totalement piégé", serait donc "une victime politique" de cette opération ?
Oui mais, là encore, ce n’est qu’une partie de la vérité car rien n’obligeait Israël à organiser ce blocus de Gaza, lui-même illégal au regard du droit international et qu’il n’était pas illégitime de vouloir forcer.
Répond notre chroniqueur, qui enchaine avec cette forte parole:
Tout se plaide dans cette affaire.
Et, puisque, nous dit-il, "c’est au fond qu’il faut aller pour en juger", il nous révèle le fond du fond de son sac à malice rhétorique:
Gaza a été transformé en prison à ciel ouvert avec, pour objectif, parfaitement clair, d’amener les Gazaouis à se révolter contre le Hamas, à désavouer les islamistes et à renverser leur pouvoir.
Ça, c'est de la géopolitique fine...
Mais, aurait pu dire Bernard Guetta, ce n'est là qu'une partie de la vérité, et il faut élargir encore notre champ de vision pour conclure:
Depuis trois ans, le siège de Gaza n’est qu’un élément de la vaste partie régionale qui oppose Israël et les régimes arabes, d’un côté, à l’Iran, au Hamas et au Hezbollah libanais, de l’autre. En ce sens, ce blocus a sa logique mais, outre qu’il consiste à prendre une population en otage, il ne mène à rien d’autre qu’à l’impasse pour Israël qui ne trouvera sa sécurité que dans la justice et la raison – celles de la création d’un État palestinien.
(Oui, mais un État sans les "islamistes", si j'ai bien suivi...)
Arrivé à ce degré de généralité, Bernard Guetta dit cela et Bernard Guetta ne dit rien.
Mais il reviendra demain, muni d'évidences qui ne sont qu'une partie de cette vérité qu'il nous révélera, car, lui, il la connaît.
2 commentaires:
Bravo pour cet article édifiant sur la duplicité du sieur Guetta.
Excellent blog. Hop! direct dans les favoris sur le mien.
Passez me voir à l'occasion.
Amicalement,
/Bertrand
http://gaideclin.blogspot.com/
A bientôt alors...
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