mardi 31 mai 2011

Le miraculeux modèle allemand

Depuis plus d'un demi-siècle, un spectre hante les grands esprits libérés de l'Europe libérale.

De temps à autre, on les voit sauter sur leurs chaises comme des cabris en disant l'Allemagne ! l'Allemagne ! l'Allemagne !

En croyant que cela finira par aboutir à quelque chose.

Les chercheurs associés de l'Institut Thomas More* viennent de se livrer à ce capricant exercice en publiant une étude intitulée, sans ambiguïté, 163 milliards de plus... Analyse comparative de la dépense publique en France et en Allemagne.

Les Échos saluent cette heureuse et salutaire initiative par un article dont le titre et le chapeau disent déjà à quel distance critique il se place:

Dépenses publiques : le grand écart franco-allemand persiste

L'Institut Thomas More détaille les surcoûts des politiques menées dans l'Hexagone. Selon cette étude, une grande réforme de l’État reste à faire. Et la comparaison avec l'Allemagne avancée par l’Élysée ne doit pas se focaliser sur la fiscalité.


Une illustration accompagne ce texte échotier, bien conçue pour montrer l'ampleur du "grand écart"...

Ça fait peur, non ?
(Mais commencez la graduation de l'axe vertical à zéro,
et choisissez une unité en conséquence,
vous verrez tout cela devenir moins impressionnant.)


Ceux qui voudraient se rendre compte de ce qui est suggéré dans cette "analyse" pour faire aller encore plus mal ce qui ne va déjà pas très bien pourront consulter le billet du blogue journalistique "Contes publics", de Philippe Le Coeur, qui détaille la féconde comparaison des deux systèmes d'éducation. Les chercheurs-renifleurs de l'ITM sont tombés en arrêt devant une mirifique "poche d'économies substantielles".

Dans ce dernier domaine, le laboratoire d'idées estime possible des économies d'un peu plus de 10 milliards d'euros. Comment ? En se rapprochant des "standards allemands" en ce qui concerne "les dépenses publiques par établissement" et "les effectifs par établissement". C'est-à-dire en réduisant le nombre d'établissements scolaires, dans le primaire et le secondaire.

Trop timide sans doute, les laborantins d'idées n'ont pas chiffré le montant des économies réalisables en supprimant tous les établissements scolaires publics.

Il doit y avoir là beaucoup plus qu'une "poche", tout de même...

Au moins un grand fourre-tout multipoche...

Le seul espoir que nous puissions nourrir est de voir se détériorer l'image de ce fameux modèle allemand dont la transplantation en nos contrées est présentée de manière si prometteuse.

Et cela me semble en très bonne voie.

Car enfin de quoi aura l'air le miracle économique allemand, vers 2022, quand l'Allemagne sera, comme on dit, "sortie du nucléaire", dont on ne sort jamais ?

Ils auront sûrement l'air enviable les miraculés modèles, s'éclairant à la bougie, ou même se chauffant à la bougie, tout en mesurant au pèse-lettre leurs émissions carbone ?

Alors que nous, peinards, jetant l'argent par les fenêtres toujours ouvertes, même en plein hiver, nous aurons nos EPR à tous les coins de rue, et peut-être aussi en version portable, avec musique et écouteurs intégrés.

Car

"L'EPR est le réacteur nucléaire le plus sûr du monde."

C'est monsieur Eric Besson qui l'a dit.

Et c'est un homme à qui on peut faire confiance.


* Les deux lecteurs qui suivent ce blogue depuis sa création - en fait, il s'agit d'une lectrice et d'un lecteur - savent que j'ai déjà consacré un billet, entièrement fait à la main, sur l'ITM, à l'occasion de la publication de leur bulletin de note nommé "Baromètre des réformes de Nicolas Sarkozy". L’Institut s'amuse à ce petit jeu tous les 6 mois... Le huitième bulletin vient de sortir, avec cette appréciation, aussi inspirée que celles qu'on trouve sur certains relevés de notes particulièrement désespérants : "un an pour convaincre..."

Aucun commentaire: