"La peur va valider l'Etat. L'opération électorale incorpore la peur et la peur de la peur à l'Etat,
en sorte qu'un élément subjectif de masse vient valider l'Etat. Disons que, après cette élection,
l'élu, Sarkozy très probablement, sera légitime au sommet de l'Etat d'avoir fait son beurre de la peur.
Il aura alors les mains libres, parce que, dès que l'Etat a été investi par la peur, il peut librement faire peur.
La dialectique ultime est celle de la peur et de la terreur.
Virtuellement, un Etat légitimé par la peur est habilité à devenir terroriste."
Alain Badiou, De quoi Sarkozy est-il le nom? , Nouvelles Editions Lignes, 2007.
en sorte qu'un élément subjectif de masse vient valider l'Etat. Disons que, après cette élection,
l'élu, Sarkozy très probablement, sera légitime au sommet de l'Etat d'avoir fait son beurre de la peur.
Il aura alors les mains libres, parce que, dès que l'Etat a été investi par la peur, il peut librement faire peur.
La dialectique ultime est celle de la peur et de la terreur.
Virtuellement, un Etat légitimé par la peur est habilité à devenir terroriste."
Alain Badiou, De quoi Sarkozy est-il le nom? , Nouvelles Editions Lignes, 2007.
Aujourd'hui, je vais m'associer solidairement au mouvement de grève nationale à la manière de Radio-France: pas de contenu éditorial, rien que la pub.
La première pub est pour l'ami Eric Hazan, qui publie dans Politis de ce jour (donc le numéro 1002, qui n'est pas en ligne), une tribune où "il montre en quoi l'anti-terrorisme est une technique de gouvernement visant à éliminer par la force les cellules rebelles de l'organisme social" (Je cite le "chapeau" de son article).
Le voici tel que le donne Indymedia-Paris-Ile de France.
Les habits neufs de l'ennemi intérieur
En France aujourd'hui, le nombre augmente sans cesse de ceux pour qui "ça ne peut pas durer", de ceux pour qui "ça va mal finir". Quand les banques perdent des fortunes, quand on tire au fusil sur la police dans les banlieues, quand on trouve alternativement dans la rue des magistrats, des lycéens, des chauffeurs de taxi et des sans-papiers, il y a bien de quoi s'inquiéter. Et, comme souvent en pareil cas, le réflexe de l'oligarchie est de créer un ennemi intérieur, pour recueillir l'assentiment général dans le resserrage de son dispositif militaro-policier.
C'est dans Le Figaro (8 juin 2007) que paraît le premier article sur les "anarcho-autonomes", reprenant sans état d'âme un communiqué des Renseignements Généraux. Notons en passant que le doublet est un procédé policier habituel pour désigner des groupes à la fois dangereux et repoussants, judéo-bolcheviques, hitléro-trotskistes, islamo-fascistes. Dans ce numéro, on apprend que "les autorités s'inquiètent de la résurgence de groupes extrémistes [...] qualifiés d'anarcho-autonomes par les services de police". Il s'agit de former le profil de la menace, de forger un sujet responsable des actions qui ont entouré l'élection du Président - attaques de locaux de partis politiques, confrontations avec la police, émeutes organisées. Il s'agit de répandre l'idée d'un partage séparant la population, incarnée par son gouvernement, de quelques individus dangereux qu'il faut neutraliser dans l'intérêt de tous.
L'article date donc de juin 2007. Puis vient le "mouvement" contre la loi Pécresse dans les universités. Une vague d'occupations incontrôlées se répand, sur la simple base de la haine politique contre le nouveau régime. Les organisations militantes ne sont pas seulement débordées, elles sont souvent exclues, inadéquates qu'elles sont pour lutter contre un monde qui leur ressemble tant, un monde de gestion et de manipulation. Et comme il faut bien donner un nom à ce qui vous échappe, les organisations commencent à voir partout se propager le péril autonome. Hallucinées, elles imaginent des "totos" partout. A voir le président de Science-Po Grenoble frapper à la barre de fer un malheureux partisan du blocage, on en vient à redouter qu'il ait été lui aussi, homme si doux par ailleurs, atteint du terrible virus.
Le dispositif est en place, il ne reste plus qu'à le nourrir. On arrête donc à Toulouse, dans les derniers jours de novembre 2007, trois jeunes gens transportant en voiture un engin explosif. Deux sont déjà fichés comme "anarcho-autonomes". On trouve chez eux un exemplaire de L'Insurrection qui vient, livre publié chez La Fabrique, et un exemplaire du second numéro de la revue Tiqqun. En janvier 2008, c'est le tour de deux jeunes parisiens, fichés eux aussi: ils sont arrêtés alors qu'ils se rendent à une manifestation contre le centre de rétention de Vincennes. Dans leur voiture, des fumigènes artisanaux. Enfin, quelques jours plus tard, deux automobilistes, dont l'un connu des services comme "anarcho-autonome", sont fouillés et trouvés en possession de chlorate de soude, d'un livre en italien détaillant la fabrication de bombes, et d'un plan de l'établissement pénitentiaire pour mineurs de Porcheville.
Le 2 février 2008, c'est au tour du Monde de se prêter à l'opération médiatico-policière: l'article est intitulé "Les RG s'inquiètent d'une résurgence de la mouvance autonome". La veille, dans Le Figaro, la ministre de l'Intérieur récitait d'ailleurs, avec sa maladresse de vieille fille, la leçon apprise: "Depuis plusieurs mois, j'ai souligné les risques d'une résurgence violente de l'extrême gauche radicale."
La vérité de l'opération policière en cours, c'est ce versant médiatique. Un système qui ne se maintient plus que par l'inflation de ses forces de police doit donner des rebelles une image haïssable: ce sont évidemment "des terroristes" - terme qui désignait, je m'en souviens parfaitement, les combattants de la Résistance à la radio de Vichy. Mais si nul n'a jamais réussi à produire une définition incontestée du "terrorisme" - tant il est vrai que le terroriste de l'un est toujours le résistant de l'autre -, on sait bien ce qu'est l'antiterrorisme, au nom duquel sont poursuivis les huit individus mentionnés plus haut. D'après les lois antiterroristes françaises, ce qui qualifie une infraction de "terroriste" n'est pas intrinsèque à l'infraction. Ici, c'est l'intention qui compte, dès lors que l'on est "en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur". Ainsi, les détenteurs de fumigènes dont j'ai parlé ne seraient pas incarcérés à l'heure actuelle s'ils n'avaient pas été préalablement fichés aux RG, s'ils n'étaient pas déjà tenus pour des individus dangereux. De même, c'est par pure construction policière que le chlorate de soude et le document italien sont devenus une bombe "en puissance", destinée à faire sauter la prison pour mineurs de Porcheville.
En réalité, l'antiterrorisme n'a rien à voir avec le "terrorisme". Il s'agit d'une technique de gouvernement visant à éliminer par la force les cellules rebelles de l'organisme social. C'est pourquoi nous devons soutenir les subversifs récemment arrêtés : au moment où l'on s'attend à des troubles graves, leur incarcération préventive est une pure manœuvre d'intimidation menée par la police politique. Ne la laissons pas sans réponse.
Eric Hazan, éditeur, directeur de la maison d'édition La Fabrique.
Et puisqu'Eric Hazan parle amplement de cette résurgence des "anarcho-autonomes" suivie avec l'attention du bon élève pas trop critique par nos journalistes à la langue basse, passons à une réclame pour le dossier "Mauvaises intentions" que vous pourrez télécharger à cette adresse ou encore à celle-là. Vous y trouverez regroupés les articles parus dans la presse, ainsi que des compléments substanciels (textes juridiques, tracts, affiches…)
Comme toutes les pubs sont désormais suivies d'un avertissement culpabilisant le "consommateur", j'ajouterai:
Attention! Après avoir lu cela, vous ne pourrez plus dire "Je ne sais pas où on va, mais on y va."
Car vous en devriez avoir au moins une idée…
PS: Une dernière information, pour mes voisins de l'est parisien (et les autres).
Les 23, 24, 25 mai 2008, se tiendra au Lieu-Dit, 6, rue Sorbier- Paris 20ème, le premier salon du livre indépendant, "Lire, écrire et résister", avec des discussions et rencontres entre lecteurs, éditeurs, auteurs et libraires.
Voir le programme à cet endroit.
14 commentaires:
A force de répéter qu'on y va, j'ai surtout l'impression qu'on y est...
Bises !
PS : comment as-tu fait pour trouver cette chanson ?!? Je l'ai cherchée plusieurs fois, sans succès...
Quel plaisir de retrouver ton optimisme débordant, ma'ame Flo Py!
Bises!
PS: Pour trouver cette chanson, j'en ai cherché une autre, et elle était juste à coté. C'est le grand principe de la bibliothèque de Warburg, décrit par mon maître Roubaud. C'est imparable!
Mouais... Ça va pas beaucoup m'aider à m'y retrouver dans les Various de Deezer, ça.
Re-bises !
PS : un "mon" intempestif semble s'être glissé dans ton message. Non ?
PPS : "débordant", c'est le mot que je cherchais !
Mais si! ça marche bien avec Deezer, mais ça ne marche pas du tout avec Gougueule, par exemple.
Je ne comprends rien à cet histoire de "mon" (non exclusif, bien entendu)
Rebises, mâ'âme!
Le "mon" ("mon maître Roubaud") m'a sauté aux yeux parce que tu parles beaucoup trop des anarcho-autonomes pour ne pas t'en sentir un peu proche. "Maître Roubaud", ça le faisait bien, non ? (sans vouloir être ni impérative, ni catégorique)
Rien de plus à comprendre, dans cette histoire de "mon" (non exclusif, bien sûr), cher Monsieur Guy :-)
Bises et bonne nuit !
Je ne sais pas jusqu'où "On" ira , mais "On y va tout droit.
(Je te laisse mettre un nom connu sur "On").
Bonne Nuit.
@ chère Mâ'âme Flo Py,
La vraie-fausse reconnaissance de ses "maîtres" est un procédé de Roubaud... dont il s'explique fort bien dans "Impératif Catégorique". Comme quoi, "tout est dans tout...etc..."
Je ne cours plus assez vite pour me sentir proche des prétendus "anarcho-autonomes" (concept policier et médiatique), mais j'aime bien, oui, voir debout et vivants ces futurs boucs émissaires désignés.
Bises.
@ Françoise,
Oui, "on" y va... mais la route ne me semble plus si droite pour lui. A nous d'en accentuer la pente!
"mais la route ne me semble plus si droite pour lui"
Peut-être, mais les obstacles ou virages éventuels ne semblent pas infranchissables. "On" ne s'en ira pas de soi-même...
Il faudrait que "nos" partis d'opposition s'y mettent avec une ardeur qui semble les avoir quittés, ou alors...
Ben, je ne suis pas la seule à déborder d'optimisme : c'est juste une question de formulation ;-)
Juste par curiosité, quels sont "nos" partis d'opposition ? J'ai déjà du mal à en trouver un, mais alors en plus, au pluriel !...
Bises !
Le pluriel est ici la marque de mon optimisme in-dé-crot-table...
Bises.
Même question...
"Le pluriel est ici la marque de mon optimisme in-dé-crot-table..."
OK. Et "au singulier", tu vois qui-quoi, avec optimisme ?
Au singulier, il doit bien rester un ou deux socialiste(s) dont la foi libérale laisse à désirer...
J'ai l'impression que vous voulez me faire déprimer, toutes deux... :-(
Au fond, en bon idéaliste non repenti, je mets plus d'espoir dans le "ou alors..." qui appelle un "nous", la masse, le peuple, les citoyens... Je crois que ça a des tas de dénominations...
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