samedi 19 septembre 2009

Conseil (de lecture) à Georges Frêche

Après la féconde saillie de monsieur Hortefeux, humoriste auvergnat contemporain, qui fit polémique, on put constater une très forte solidarité gouvernementale.

Y compris de la part de monsieur Jack Lang, à qui il faudrait peut-être expliquer qu'il n'y est toujours pas, au gouvernement:

«Je le connais depuis longtemps : il n'est pas raciste, c'est un homme honnête pour lequel j'ai de la sympathie personnelle»

Cette pétition de principe (je le connais, donc il n'est pas raciste) passa inaperçue tant on est gavé des déclarations de notre ministre de la Culture honoraire.

Georges Frêche, socialiste in partibus.

Monsieur Georges Frêche, au contraire, a l'art de ne jamais passer inaperçu.

Sa défense des propos de monsieur Hortefeux fut donc largement relayée:

La polémique est "ridicule", selon lui. "J'ai entendu ses propos et je n'y trouve rien d'extraordinaire. Aujourd'hui, on demande à tous les hommes politiques de faire de la langue de bois sous peine d'être cloué au pilori. Hortefeux n'est pas raciste !".

On pourrait songer à le nommer à un poste de sous-secrétaire d'état à la sous-merde, qui est une de ses grandes spécialités, comme on sait...

A condition qu'il sache encore lire, on ne peut que lui conseiller l'article que viennent de publier, dans le Monde, Stéphane Beaud et Gérard Noiriel.

Cet article, intitulé Le retour du refoulé, par une analyse complète de la séquence de la blague auvergnate, démonte avec un sérieux impressionnant l'argument de la sortie du contexte, et, au final, replace le bon mot hortefien dans son véritable contexte, celui créé par "la politique identitaire mise en œuvre par le candidat de l'UMP lors des présidentielles de 2007."

Nous avons été nombreux à protester contre le ministère de l'immigration et de l'identité nationale, créé par Nicolas Sarkozy pour rallier les suffrages du FN, parce que nous étions convaincus que le simple fait d'associer les mots "immigration" et "identité nationale" ne pouvait que conforter les préjugés d'une partie de la population à l'égard des Français issus de l'immigration. Cette séquence vidéo confirme hélas nos inquiétudes.

L'UMP a fondé sa stratégie politique sur l'ethnicisation des rapports sociaux, ce qui aboutit à enfermer les individus dans leurs origines ou leur couleur de peau. La célébration de "nos petits Arabes" bien intégrés - auxquels on accorde un strapontin gouvernemental quand ils font partie de l'élite, afin qu'ils fournissent tous les brevets d'antiracisme dont le pouvoir a besoin - va de pair avec la stigmatisation de ceux d'entre eux qui appartiennent aux classes populaires. Ce sont les deux facettes de cette politique identitaire que donnent à voir les images diffusées par le site Internet du Monde.

6 commentaires:

Marianne a dit…

La tentative d'explication vaseuse de l'auteur , ministre de son état, indiquant qu'il parlait des auvergnats me semble encore plus honteuse que les propos sur les arabes . Comment un personnage au plus haut niveau de l'état , preuves irréfutables existantes ,peut -il avoir l'outrecuidance de venir mentir en direct. Cela laisse augurer de ce qu'il fait en privé .
Quand aux médias , un coup de balai devant leurs portes pour qu'ils cessent de mettre les origines du ou des concernés lorsqu'ils relatent des faits divers qui ne sont pas le fait des origines des concernés .

Guy M. a dit…

Le fait que l'on se contente de cette explication et des regrets qui vont avec, en dit long sur le conditionnement auquel nous sommes soumis...

(Et l'indication des origines ethno-culturelles dans la presse en fait partie.)

Dorémi a dit…

Des origines ethno-culturelles et des préférences sexuelles aussi…

Guy M. a dit…

Les préférences sexuelles sont moins régulièrement indiquées dans la relation des faits divers.

Mais on en fait grand usage dans d'autres rubriques...

Pat H. a dit…

Court, mais sacrément efficace !
Malheureusement, on est bien forcés de constater que Frêche a raison : les propos d'Hortefeux n'ont rien d'extraordinaire. Quand on a la très grande chance d'avoir un boulot dans une world compagny quelconque, on peut les entendre tous les jours (ou presque) à la pause café. C'est parfois subtil, parfois décomplexé. Mais c'est récurrent, assurément. Et d'autant plus difficile à contrer que c'est toujours énoncé sur le ton de l'évidence (souvent avec un "je-ne-suis-pas-raciste-mais" en guise de préambule).
(Je me décourage pas, hein. Mais ça fout quand même les chocottes...)

Bises

Guy M. a dit…

"Récurrent, assurément", c'est cela que pointent Beaud et Noiriel, cette routine un peu ennuyeuse de propos qui devraient faire bondir.

Ne nous décourageons pas...

(Seraient trop contents!)