samedi 19 juillet 2008

Ménage dans les rectorats




Les employés de la grande entreprise en voie de modernisation qui, de mon temps, s'appelait l'EdukNat, savent que jadis, au mois de juillet, les couloirs des rectorats bruissaient d'une activité inhabituelle en ces lieux à l'atmosphère feutrée.

On ouvrait les "placards", on y faisait le ménage, on opérait à quelques substitutions et, surtout, on recensait les places vacantes. Il y avait toujours un (ou plus) chef d'établissement dont le doigté (essentiellement le medius) dans la gestion des ressources humaines nécessitait, pour les besoins du service, la mutation à un poste de chargé de mission auprès du recteur, ou auprès du ministre, et par conséquent le remplacement par un homme ou une femme de confiance…

Du côté des enseignants, quelques catastrophes académiques reconnues bénéficiaient de quelque attention de la part de leur service de gestion: simple jeu de chaises musicales…

On parlait aussi de certaines affaires locales...

En général, les informations sur ces réajustements cosmétiques transpiraient en septembre, au triste jour de la prérentrée des enseignants, et mettaient un peu de gaieté ironique dans les cœurs les plus amers.

Si j'en crois les informations que propage le Contre Journal de Liberation.fr, les rectorats ont décidé de travailler plus, sans doute pour gagner plus de points (à l'EdukNat tout le monde est noté, alors je pense que les recteurs aussi sont notés…)



Dominique Piveteau, professeur des écoles, qui assure le CP à l'école Cavé, à la Goutte-d'or, formateur à l'IUFM, a refusé une inspection. C'est un droit reconnu. Convoqué le 16 juin à l'inspection d'académie, il découvre un rapport constitué à l'aide de documents par lui fournis. On lui reproche par exemple l'agencement de sa classe… On lui reproche aussi d'avoir animé un cours de cuisine qui n'était pas dans le cadre du programme et d'avoir travaillé sur un article de Charlie Hebdo. Là-dessus, on lui propose de demander sa mutation. Ce qu'il refuse.

"Une deuxième entrevue a lieu le 25 juin. J'ai constitué, de mon côté, un contre-rapport de 700 pages, dont 650 lettres de soutien de collègues, stagiaires IUFM, parents d'élèves. L'inspecteur maintient pourtant sa décision et me donne trois heures pour formuler une demande de mutation. Devant mon refus réitéré, les syndicats sont avertis de ma mutation d'office. Suite à une rencontre avec l'intersyndicale, j'ai obtenu un délai supplémentaire et j'ai demandé une contre-inspection, qui a été refusée. J'ai donc engagé une procédure de recours au ministère, auprès du DRH et du responsable des contentieux de l'Education nationale. Mon cas devait être traité lors de l'affiliation des postes, pour la rentrée 2008, mais rien n'a été décidé." (D. Piveteau, Contre Journal)

Je remarque, mais c'est hors-sujet, que Dominique Piveteau est militant à RESF (Réseau Education Sans Frontières) et au Groupe de Pédagogie Nouvelle, et qu'il a exprimé de très sérieuses et fermes réserves sur les réformes dans l'enseignement primaire…

Mais je m'égare…

Sur cette affaire, on peut consulter également l'article de Rue89 (avec une vidéo).

Et si voulez vous égarer un peu comme je l'ai fait, vous pouvez regarder cet autre article de Ru89.


Rodolphe, lui, est enseignant stagiaire en mathématiques et physique-chimie. Il est suspendu de son poste à l’EdukNat depuis sa mise en cause par des policiers lors d’une manifestation, début avril, à Paris.

Selon le rectorat, il risquerait de «corrompre son milieu professionnel».

Pendant les vacances…

Je rigole.

[Excusez moi, c'est nerveux.]

Et bien sûr sa titularisation éventuelle est repoussée.

Selon lui, on aurait affirmé à son sujet au rectorat que le recteur ne pouvait «pas prendre le risque de garder quelqu'un qui aurait de mauvaises mœurs».

Je rigole.

[Excusez moi, ça ne m'arrive jamais, ça doit être nerveux.]

Sérieusement, de quoi est accusé Rodolphe? Pour violence à agents

C'était le 3 avril, Rodolphe encadrait une des manifestations lycéennes contre les suppressions de postes à Paris.

Son récit des faits a pour moi, qui ait vu des scènes de ce type et ait recueilli des récits analogues, toutes les caractéristiques de la sincérité:

"Beaucoup de policiers étaient présents et rythmaient la marche, imposant arrêts et accélérations. A la fin du défilé, près du métro Saint François Xavier, les lycéens se sont rassemblés dans le calme, la plupart s’était assis par terre. J’ai alors vu certains policiers enlever leurs brassards, puis se mêler à la foule. Lorsqu'ils se sont rapprochés d'un groupe de lycéens, je les ai suivis. Une dizaine de jeunes s’étaient fait interpeller, de façon assez violente, pendant le défilé. Constatant ma présence, les policiers m'ont demandé de m'éloigner, mais j’ai insisté pour rester, en leur expliquant que la manifestation était autorisée. L'échange a duré deux ou trois minutes, puis ils m'ont interpellé.

Je pensais subir un simple contrôle d'identité. J’ai tout d'abord été fouillé, derrière le camion. Voyant des marqueurs dans mon sac, l'un des policiers m'a lancé «t'es un taggueur». Je me suis présenté comme professeur. Mais l’un d’eux a déclaré à son collègue: «Tu l'as bien vu jeter des cailloux, hein?» «Ouais, ouais, je l'ai vu» a répondu le deuxième agent. J'ai contesté l’accusation, mais ils l’ont répétée à leur responsable. J'ai alors été placé en garde à vue pendant 24 heures, accusé de violence à agents. J'ai été déféré le lendemain matin au Tribunal de grande instance, pour une comparution immédiate. Entre temps, deux des trois policiers qui m'avaient accusé s'étaient désistés. Le procès, qui devait se tenir le 17 avril, a été reporté en l’absence du policier, au 24 septembre." (Rodolphe, Contre Journal)


Une question me vient:

Monsieur Xavier Darcos, blanchi d'une accusation de fraude au baccalauréat en 1982, fut-il alors suspendu de ses fonctions en attente du jugement ?

9 commentaires:

Anonyme a dit…

Ah ! Vivement qu'on confie tout ça à des entreprises médéfiennes ! Ça filerait plus droit, nom de d'là !

Tiens, tu veux la preuve qui sont zeureux les employés dans le privé ?

http://www.marianne2.fr/Le-lip-dub-travailler-plus-en-chantant-plus_a89306.html

They are Happy !

Bon samedi à toi.

Anonyme a dit…

Euh... C'est pas "Anonyme", c'est juste moi qui vient d'écrire, là...

Guy M. a dit…

Françoise,

Blogger est parfois déroutant...

Merci pour ce lien très tonique.

Bon ouiquende.

Anonyme a dit…

@ Françoise : oui oui, trop merci (c'est bien comme ça qu'i' disent les djeunz, non ?) pour ce lien qui me fait trépigner d'impatience de rejoindre (en septembre) la World Compagny qui m'emploie...
Bon, je vous laisse, mon cours de claquettes va commencer, là.

Bises !

Guy M. a dit…

@ Flo Py,

Que je t'envie de pouvoir encore faire des claquettes!

Mais, bon, tu en auras surement marre avant que ça ne me reprenne.

Allons-y: ... trois, quatre!

Bises.

Anonyme a dit…

Mais sinon, en gros, la Droite, elle est sûre d'elle à ce point là ? Et sûre qu'il n'y aura pas d'autres réactions que celles de Rue89, du Contre-journal, et des blogs de résistance ?...
Parce que personne d'autre ne trouve ça effrayant, je veux dire personne dans "l'opinion" ?
Bouhouhou...
Kiki :-(

Anonyme a dit…

Je sens que je vais encore briller par mon optimisme débridé, moi...
La Droite s'en tamponne le coquillard (si tu me passes l'expression) des réactions (d'ailleurs, "les gens" réagissent de moins en moins). Et avec tout ce que nos courageux "représentants" sont en train de me mettre en place (je pense à EDVIGE, mais aussi aux réflexions engagées au niveau européen pour trouver un moyen de mieux contrôler les blogs ; j'ai le flemme de chercher un lien parce qu'il est tard, mais au sujet des blogs, il me semble avoir lu que ça se jouera le 2 septembre, en séance plénière), je ne sais pas s'ils ont les moyens de nous faire parler, mais celui de nous faire taire, c'est certain !

Plein de bises et bonne nuit !

PS pour Monsieur Guy : je suis nulle en claquettes (aussi), j'ai aucun sens du rythme. Mais ça ne m'empêche pas d'adorer ça ! J'ai longtemps fantasmé sur Gene Kelly ; ça laisse des séquelles :-)

Anonyme a dit…

Ici à Oaxaca (et dans le reste du Mexique d´ailleurs) toutes les radios officielles diffusaient y´a encore pas longtemps le petit spot avec pleins d´enfants rieurs chantonnant "Les profs en classe, pas dans la rue! Les profs dans les écoles, pas au piquet de grève!"

Ah Ah Ah

Petite chansonnette que je n´arrive toujours pas à m´extirper du crâne, d´ailleurs...

Bises
ainsi qu´à Rodolphe que je ne connais pas, mais n´empêche, j`ai connu quelques Rodolphettes dans le même cas de figure...

Guy M. a dit…

@ Kiki,

Hélas, le contrôle de l'opinion est en très bonne voie. Le Contre Journal se présente même comme spécialisé dans l'information "occultée"...

@ Flo Py,

"...nous faire taire": tu pourras te taire, toi? J'y crois pas!

@Agronome sifflotant,

Alors tu sifflotes les airs de propagande dirigés contre les "instits" d'Oaxaca !

Justement, Oaxaca est un bel exemple de contrôle de l'information: on ne dit rien.

(Ps: à propos des Rodolphettes: ne laisse pas entendre que les filles se laissent coincer plus facilement, il y a plein de féministes qui me lisent...)

Bisous et n'oublie pas de me prendre du Mezcal à Cuernavaca, et de faire une libation à la mémoire de Malcolm Lowry...